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Avant-projet de loi sur l'eau: quels impacts pour les collectivités locales ?

Publié le 26 octobre 2004

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L'avant-projet de loi tente de transcrire les objectifs ambitieux de la directive cadre européenne sur la qualité de l'eau en axant les réformes sur trois grands sujets : les procédures, moyens et actions à mettre en œuvre pour la préservation qualitative et quantitative des ressources en eaux et des milieux aquatiques, les adaptations des services publics locaux de l'eau et de l'assainissement, et la réforme des interventions institutionnelles dans ces domaines. Les communautés, lorsqu'elles sont dotées de la compétence eau potable et/ou assainissement, sont principalement concernées par les réformes prévues au titre II et, à la marge, par celles du titre III de l'avant-projet.
Avant-projet de loi sur l'eau: quels impacts pour les collectivités locales ?  - Batiweb

Renforcement de la compétence assainissement des collectivités:

Le pouvoir de contrôle des collectivités compétentes en assainissement serait renforcé pour établir les prescriptions techniques des raccordements au réseau public pour la réalisation des raccordements à l'égout, le contrôle des branchements, et celui des eaux usées déversées, notamment les eaux usées non domestiques.

Par ailleurs, en matière d'assainissement non collectif, la collectivité pourrait, en plus du service de contrôle et d'entretien, proposer des prestations de construction, de mise en conformité ou de renouvellement des installations individuelles. Certaines collectivités ont expérimenté ces prestations dans un cadre limité, mais la réglementation n'autorise pas les agents publics à intervenir pour des travaux dans le domaine privé. Si ces nouvelles dispositions sont adoptées, elles pourraient changer les contours de certains services, répondant aux demandes d'usagers et de collectivités.

Création d'un fonds de garantie pour les dommages liés à l'épandage des boues d'épuration urbaines

Un fonds alimenté par une contribution supplémentaire aux primes d'assurance des producteurs de boues viserait à couvrir les indemnisations pour les dommages liés à l'épandage des boues d'épuration urbaines dont la responsabilité ne peut être identifiée.

Assouplissement des possibilités de gestion financière des services

La gestion pluriannuelle des services serait facilitée par la possibilité d'inscrire des autorisations de programme et des crédits de paiement en dépenses d'investissement, celle de voter la section d'investissement du budget primitif en excédant afin de constituer des réserves pour un programme pluriannuel de travaux, et enfin la possibilité de financer le service d'assainissement non collectif par le budget général pendant les quatre premières années de mise en place du service.

Les deux premières dispositions constituent un progrès incontestable pour la gestion des services publics d'eau et d'assainissement qui se voient officiellement reconnaître la possibilité d'une gestion financière programmée. Elles leur permettraient d'élaborer des prospectives serrées sur le niveau des tarifs et sur la gestion pluriannuelle des gros investissements.

La troisième disposition répond aux difficultés financières de mise en œuvre du service public d'assainissement non collectif (SPANC) rencontrées par de nombreuses collectivités lors de la mise en place d'un service nouveau dont les coûts doivent être entièrement couverts par une redevance, alors même que les usagers ne sont pas toujours identifiés et que le service n'est pas encore rendu. Cette libéralité devrait donner un peu de souplesse à la mise en œuvre des SPANC, notamment dans les collectivités rurales où l'assainissement non collectif est majoritaire.

Modification des principes de tarification des services

Plusieurs dispositions sont prévues, notamment la suppression et le remboursement dans un délai de 5 ans des dépôts de garantie. Les principes d'une tarification au volume d'eau consommé et la possibilité d'un abonnement sont réaffirmés, la tarification dégressive est limitée et la tarification progressive rendue explicitement possible. La possibilité de faire varier le tarif en fonction de la saison dans les communes touristiques est introduite, de même qu'en cas d'impayés, l'obligation de maintenir l'alimentation en eau quatre mois minimum après information de l'abonné, et enfin l'obligation de procéder avant le 1er janvier 2007 à une unification des tarifs aux usagers.

La suppression et le remboursement des dépôts de garantie : Demande pressante d'associations de consommateurs, l'abandon des dépôts de garantie se fait progressivement, depuis quelques années, dans de nombreuses collectivités qui les remplacent par des frais d'accès au service.

Si cette disposition est maintenue dans la loi, les collectivités ayant délégué leurs services seront en droit d'exiger un remboursement immédiat de l'ensemble des dépôts de garantie en la possession du délégataire, sans contrepartie financière.

L'unification des tarifs des services d'eau et d'assainissement : Le principe juridique classique d'égalité des usagers devant les services publics est réaffirmé par le texte qui prévoit même une échéance proche (1er janvier 2007) pour procéder à l'adoption d'une grille tarifaire unique pour l'ensemble des usagers des services d'eau et d'assainissement, sans distinction de catégorie.

Les tarifs particuliers (notamment tarif préférentiel aux administrations, hors bornes d'incendie) sont ici visé. Ils sont déjà largement abandonnés dans la plupart des collectivités. Une autre conséquence attendue est l'obligation pour les communautés n'ayant pas encore procédé à une unification tarifaire complète sur leur périmètre de le faire dans ce même temps.

Financement du service d'évacuation des eaux pluviales

La possibilité de financer les ouvrages de lutte contre le ruissellement et l'évacuation des eaux pluviales par une redevance spécifique, perçue auprès des bénéficiaires est confirmée. La redevance instituée par la collectivité compétente devrait notamment tenir compte du volume d'eau collecté sur les surfaces imperméabilisées.

Cette disposition répond en partie à une difficulté récurrente sur le financement du service d'évacuation des eaux pluviales : le service est techniquement proche du service d'assainissement des eaux usées, mais il est juridiquement rattaché à la compétence voirie des collectivités et ainsi financièrement couvert par le budget général. Une circulaire du 5 juillet 2001, incluant la gestion des eaux pluviales dans la compétence optionnelle assainissement des communautés d'agglomération, introduit une confusion en distinguant le service assainissement classique, financé par l'usager, qui ne porte que sur les eaux usées, et la compétence optionnelle assainissement des communautés d'agglomérations (et des communautés urbaines) qui porte également sur la collecte des eaux pluviales.

La possibilité d'instituer une redevance pour service rendu en la matière était donc juridiquement fragile et le texte lui apporte une base solide. Il ne règle cependant pas les difficultés d'application : mode de facturation, détermination des usagers concernés, définition d'un mode de calcul simple et vérifiable…

Encadrement des travaux de renouvellement confiés à un délégataire

L'avant-projet de loi prévoit que les contrats de délégation de service contiennent un programme prévisionnel des travaux de renouvellement à charge de l'exploitant. Les travaux réellement entrepris sont comparés en fin de contrat à ce programme contractuel. Si leur montant est inférieur, l'exploitant verse le solde à la collectivité.

Cette disposition s'inscrit dans la pratique actuelle, retenue par de nombreuses collectivités, qui vise, à travers la mise en place de comptes de renouvellement, à encadrer la gestion patrimoniale confiée à leur exploitant. Elle va dans le sens d'une clarification des missions confiées aux exploitants privés et d'un meilleur contrôle par les collectivités de leurs services délégués. Notons que cette disposition a pour vocation de s'appliquer également aux contrats en cours.

Renforcement du rôle des départements

Le FNDAE est supprimé et remplacé, à compter du 1er janvier 2007, par un fonds départemental pour l'alimentation en eau et l'assainissement, dont le montant est fixé par le conseil général, dans la limite de 0,15 €/m3.

Ce fonds géré par les départements aura pour finalité d'aider les collectivités dans le financement de leurs gros travaux (investissements initiaux et remboursement d'emprunts), de financer l'assistance technique aux services mise en œuvre par les départements, et enfin d'aider au regroupement intercommunal pour la gestion des services d'eau et d'assainissement.

Le texte confirme ainsi la politique actuelle des départements dans leur rôle d'encadrement, d'assistance et d'aide au financement des services. Il leur donne des moyens financiers solides à travers la gestion d'un fonds dont les ressources sont librement définies. Enfin, notons que l'incitation aux regroupements intercommunaux, déjà pratiquée par de nombreux conseils généraux, est prévue officiellement.

Les responsables des services d'eau et d'assainissement dans les communautés se voient ainsi préciser par ce nouvel avant-projet de loi sur l'eau un certain nombre d'obligations qui concourent à la mise en œuvre de la politique européenne et nationale sur la protection des ressources en eau.

Ils resteront en revanche sur leur faim en tant que praticiens au sujet d'attentes plus concrètes concernant des problèmes de gestion courante, telles que les possibilités de percevoir des subventions d'équipement des communes pour la réalisation de gros investissements, la constitution de fonds de renouvellement globalisés sur un périmètre, la clarification des règles à adopter pour le passage à l'individualisation des compteurs d'eau, un encadrement plus exigeant des obligations d'information des délégataires, les pratiques à mettre en œuvre pour le raccordement d'effluents non domestiques, autant de préoccupations qui ne sont pas évoquées par l'avant-projet de loi.

Par Gaëlle Galand - DE Conseil

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