La réquisition de logements vides, une solution uniquement d'urgence
La réquisition de logements est possible depuis une ordonnance du 11 octobre 1945 prise par le général de Gaulle pour répondre au manque dramatique de logements au sortir de la guerre. Incorporée dans le Code de la construction et de l'habitat (titre IV, article L641), elle donne de larges pouvoirs à l'Etat qui, après avis des maires, peut exercer le droit de réquisition "dans toutes les communes où sévit une crise du logement".
La durée maximale de la réquisition est d'"un an renouvelable" précise le texte qui s'applique à "des locaux à usage d'habitation vacants, inoccupés ou insuffisamment occupés" qui doivent être mis à la disposition de "personnes dépourvues de logement ou logées dans des conditions manifestement insuffisantes".
Utilisée dans les années 50 et 60, cette disposition est ensuite un peu tombée en désuétude mais la loi contre l'exclusion de juillet 1998 a cherché à simplifier le dispositif. Elle donne aux préfets le pouvoir de réquisitionner les locaux des entreprises vacants depuis plus de 18 mois pour une durée d'un an au moins et de six ans au plus, extensible à 12 ans lorsque l'importance des travaux de mise aux normes le justifie. Ce sont justement ces délais dans le temps qui atténuent la portée des réquisitions.
Favorable au principe car il "répond à une situation exceptionnelle de crise", Joaquim Soares, directeur de l'Espace Solidarité Habitat, qui dépend de la Fondation Abbé-Pierre, juge néanmoins que "la réquisition de logements vides est quelque chose de circonstanciel qui ne peut en aucun cas résoudre le problème de fond du manque de logements sociaux".
Juriste à la Confédération nationale du logement (CNL), Alex Maudet, parle même d'un "miroir aux alouettes" qui "donne une porte de sortie facile aux responsabilités de l'Etat". Le problème est que "les réquisitions sont partielles et provisoires. Après une certaine durée, l'immeuble doit être vidé".
Le secrétaire général du Haut Comité pour le logement des défavorisés, Bernard Lacharme, juge le texte actuel "un peu faible" et souhaiterait "qu'il donne plus de liberté à la puissance publique" en élargissant par exemple "la définition des locaux réquisitionnables" qui exclut actuellement ceux des particuliers.