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Peu lisible et trop complexe, le contrat de génération séduit peu

Publié le 10 février 2016

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Le contrat de génération affiche un bilan nettement « en deçà des objectifs fixés à l'origine », selon le rapport annuel de la Cour des comptes, publié ce mercredi. Ce dispositif, créé en mars 2013, devait encourager le recrutement des jeunes, l'embauche et le maintien dans l'emploi des seniors, tout en assurant le transfert de compétences entre les générations. Retour sur les raisons de cet échec.
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Au moment de la publication de la loi en mars 2013, la création de contrats de génération était l'une des solutions imaginées par le gouvernement pour inverser la courbe du chômage. Les objectifs fixés à l'époque étaient d'ailleurs ambitieux : une cible de 100 000 contrats par an, pour atteindre un total de 500 000 embauches d'ici 2017.

Peut-être trop ambitieux. A l'heure du bilan, le dispositif présente des résultats « nettement en deçà des objectifs », selon le rapport annuel de la Cour des comptes, publié ce mercredi. Au 19 juillet 2015, 49 010 demandes d’aides avaient été enregistrées par Pôle emploi, dont 40 294 avaient été validées (soit un taux d’acceptation de plus de 80 %) au bénéfice d’environ 80 000 jeunes et seniors. Ces chiffres se situent très en deçà des objectifs, puisque les cibles mentionnées dans l’étude d’impact auraient dû correspondre, à la même date, à un total de près de 200 000 contrats aidés au bénéfice de 400 000 jeunes et seniors.

« De surcroît, près des deux tiers des jeunes en ayant bénéficié étaient déjà présents dans les entreprises concernées, si bien que son effet sur le chômage apparaît quasiment négligeable », souligne le rapport.

De plus, le contrat de génération bénéficie aujourd’hui prioritairement à des jeunes relativement qualifiés : 67 % des jeunes recrutés avaient un niveau de formation classé de I (master) à IV (baccalauréat) – dont 18 % aux niveaux I et II (doctorat) contre seulement 7 % de jeunes sans qualification et 26 % d’un niveau V ou V bis (CAP ou BEP).


Enfin, l'application du dispositif en fonction des territoires apparaît souvent inversement proportionnelle aux difficultés rencontrées par les jeunes et les seniors. Ainsi, le contrat de génération est quasiment inutilisé outre-mer, puisque, sans tenir compte du cas particulier de Mayotte39, on ne comptait en juillet 2015 que 341 demandes d’aide enregistrées à La Réunion, en Guyane, en Martinique et en Guadeloupe, soit moins de 1 % du total des aides comptabilisées par Pôle Emploi.

Des employeurs peu convaincus

La première raison de l'échec tient au fait que le dispositif dépendait d'une négociation préalable et obligatoire, « ce qui a été perçu par de nombreuses entreprises comme une contrainte et non comme une opportunité », peut-on lire dans le rapport.

En témoignent les chiffres : un an après l’adoption de la loi du 1er mars 2013, alors que le délai de sept mois imparti à la négociation collective était largement écoulé, près de 50 % des effectifs des entreprises ou groupes de plus de 300 salariés et plus de 60 % des effectifs des entreprises de 50 à 300 salariés n’étaient pas couverts par un texte relatif au contrat de génération.


Malgré certaines modifications du texte en 2014, le dispositif est apparu comme « peu lisible et complexe à mettre en œuvre » pour parvenir à « convaincre les entreprises de son intérêt », malgré l'aide financière proposée de 4 000 euros par emploi (voire 8 000 euros cas de double recrutement), selon la Cour des comptes.

Même la menace d'une pénalité, pouvant aller jusqu'à 1 % de la masse salariale, s'est révélée inefficace et a été « quasiment inappliquée par l'administration en dépit du constat de carences manifestes ».

La deuxième raison est l’inadaptation des critères d’éligibilité à l’aide financière, tout particulièrement du fait de l’exclusion des entreprises appartenant à un groupe de plus de 300 salariés.

Vers un dispositif revu et corrigé ?

Dans son rapport, la Cour des comptes recommande ainsi de redéfinir en profondeur le dispositif du contrat de génération, notamment en ce qui concerne la pénalité liée à l’obligation de négocier un accord collectif et le critère de non appartenance à un groupe.

Une proposition qui ne trouve pas d'écho au gouvernement. La ministre du Travail, Myriam El Khomri, a jugé qu'il était « prématuré » de tirer le constat de l'échec du dispositif et de le revoir. « Le dispositif est en cours d'appropriation par les entreprises », a argué la ministre dans une réponse au rapport, précisant que plusieurs adaptations ont déjà été faites, notamment avec l'abandon de l'obligation de négociation préalable pour les entreprises de 50 à moins de 300 salariés.


Concernant l'ouverture des critères d'aides financières aux entreprises de plus de 300 salariés, « un tel assouplissement accroîtrait (...) le risque « d’effet d’aubaine », ajoute le ministre des Finances et des comptes publics, dans une réponse commune avec le secrétaire d'Etat chargé du Budget, Christian Eckert.


Le dispositif devrait donc rester en l'état pour les deux prochaines années à venir.


C.T 

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