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Baromètre Qualitel 2023 : les crises changent la façon d'habiter

Publié le 12 octobre 2023

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Dans son dernier baromètre intitulé « Le logement, grand témoin des nouveaux modes de vie des Français », l’association Qualitel pointe du doigt le bouleversement des usages de l’habitat face aux crises « à répétition ». Des chiffres commentés avec des architectes, élus et urbanistes.
Baromètre Qualitel 2023 : les crises changent la façon d'habiter - Batiweb

Depuis le lancement du baromètre Qualitel en 2017, les analyses sur les attentes des ménages en matière de logement n’ont jamais été aussi poussées. 

« Les Français sont confrontés à de multiples crises à répétition : crise sanitaire, crise économique, crise énergétique, crise environnementale, et même crise sociale. Et le tout dans un contexte international en perpétuelle ébullition. En témoigne encore l'actualité récente et dramatique au Moyen-Orient », constate Bertrand Delcambre, président de l’association. 

« Nous avons donc voulu mettre en évidence les impacts de ces crises sur la façon d'habiter », expose-t-il, à propos du 7ème baromètre, dévoilé ce 12 octobre. 

 

Des Français de plus en plus casaniers, pour se divertir… 

 

Confinements, inflation, flambée des prix de l’énergie, crise du logement… L’ensemble de ces tensions n’ont pas épargné la France ces trois dernières années. De quoi modifier les usages des ménages en matière de logement.

Sur les 3 414 Français interrogés par Ipsos entre avril et mai dernier, environ le quart semble avoir réduit leurs sorties, « suite, sans doute à la crise Covid, mais aussi plus récemment à l'inflation. Il y a sans doute les deux phénomènes », analyse Estelle Chandèze, directrice adjointe du service Line Corporate Reputation chez Ipsos.

« Ces deux phénomènes ont installé dans la durée le fait de sortir moins souvent de chez soi, que ce soit pour aller au restaurant, au café ou dans un bar, au cinéma, à des concerts ou même faire du sport à l'extérieur », développe l’intéressée.

Des loisirs que les sondés préfèrent pratiquer chez eux. 28 % déclarent se faire plus fréquemment livrer des repas, 25 % préfèrent plus souvent regarder des films et séries à domicile, tandis que 24 % y font du sport. « La principale raison, c'est d'avoir le confort. On a aussi des raisons liées aux gains de temps ou aux économies »,  explique Estelle Chandèze. 

« Il y a de plus en plus d'usages dans le logement. C’est exponentiel. Il y a le sport. Je dirais même aussi qu’il y a le souvenir. On a observé des gens qui veulent aussi des espaces pour se souvenir de quelqu'un qui a disparu, d’une étape de la vie. Et ça évidemment, avec l'espace qui nous est alloué, c'est impossible. En plus, avec la relevée des taux d'intérêt, on a une instabilité résidentielle. Ce qui fait que dans ces logements-là, on entasse une place sur une place », poursuit de son côté le sociologue et urbaniste Yankel Fijalkow. 

 

… et de (télé)travailler

 

Un autre usage de l’habitat a été aussi amplifié par la pandémie : le télétravail. Selon le baromètre Qualitel 2023, 61 % des télétravailleurs font plus de télétravail qu’il y a trois ans. « On voit que près de la moitié nous déclarent travailler au moins une fois de temps en temps dans leur pièce à vivre ou dans leur salon. Et c'est encore plus le cas chez les habitants d'appartements, qui le font à 54 % », relève l’experte d’Ipsos.

Si 41 % ont un espace dédié ou un bureau - part qui diminue à 30 % pour ceux habitant dans un appartement -, 22 % ne sont pas satisfaits de leur installation de bureau à domicile. Cette portion « augmente lorsqu'il y a plusieurs personnes qui télétravaillent en même temps dans le même logement. Donc effectivement on partage, on partage peut-être un salon ou une pièce commune à un ou plusieurs télétravailleurs. Et ça, ça génère de l'inconfort ou de l'insatisfaction pour une partie des Français », précise Estelle Chandèze.  

« Le télétravail se fait aussi quelque part entre deux sites. On peut le faire une partie de la journée chez soi et une partie à l'extérieur », remarque de son côté Lionel Causse, député et président du Conseil national de l’habitat. « Ce qui nécessite bien entendu d'avoir à proximité des services d'accueil, des services grâce auxquels on peut travailler, des services auxquels on peut être, bien entendu, connectés. Et d'avoir des enjeux de mobilité plus douces. C’est effectivement ce sur quoi nous devons et nous essayons d'accélérer », abonde l’élu.

Si la voiture demeure le premier moyen de locomotion des Français, le vélo arrive à la deuxième place. 17 % des Français qui possèdent un vélo, l’utilisent plus au quotidien qu’il y a trois ans, dont 24 % habitant en appartement et 33 % dans des appartements de moins de dix ans. 87 % n’ont cependant pas l’intention d’acheter un vélo, avec 20 % d’entre eux en raison d'un manque de place pour le ranger (33 % pour ceux habitant en appartement). 

Même tendance pour la voiture électrique : 88 % n’ont pas l’intention d’en acheter dans les 12 prochains mois. 41 % évoquent derrière un manque de bornes de recharge au domicile ou à proximité

« Finalement on revient à un habitat qui est, je dirais, l'habitat ancestral, avec l'ensemble des services et des commodités autour. Ce qui me faisait venir à une deuxième réflexion : le mouvement moderne des années 1930, qui a finalement mis en place le zoning avec des espaces pour habiter, des espaces pour travailler et des espaces pour se divertir. Ce modèle est train d’exploser », note Jean-Michel Woulkoff, président de l’Union des Architectes (UNSFA). 

 

Le logement, un levier d’économies, voire de revenus ? 

 

Au-delà du confort, les Français orientent de plus en plus l’usage des logements à des fins d’économies, voire même de revenus. D’après le dernier baromètre Qualitel, cette tendance s’observe chez les propriétaires et locataires de moins de 35 ans

43 % des répondants dans cette tranche d’âge envisagent de revendre l’éléctricité produite par leur logement (contre 28 % au total). 35 % songent à louer leur logement pendant les vacances (contre 17 % au total). Parmi les locataires, 35 % des moins de 35 ans aimeraient sous-louer leur logement (contre 25 % au total). 

« Grand témoin des nouveaux modes de vie des Français », comme le souligne si bien le baromètre, l’habitat tend à être intergénérationnel. Une idée qui séduit les 18-24 ans (38 %), davantage que les 70 et plus (19 %). « On a peut-être un peu plus de de méfiance chez les séniors qui ne sont que 19 %, donc un peu plus frileux sur ce principe », commente Estelle Chandèze.

« Je pense que la plus grande motivation des jeunes à vivre avec les personnes les plus âgées, elle est économique. Cela n'empêche pas les belles histoires. Il peut y avoir d'autres aspirations. Mais il y a quand même cet enjeu économique, il faut bien l'avoir en tête », estime à ce propos Antoine Desbarrières, directeur de l’association Qualitel.

Les chiffres du baromètre Qualitel 2023 dans la vidéo ci-dessous :  

Virginie Kroun
Photo de Une : V.K

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