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La Cour des Comptes questionne le rôle de l’Afitf

Publié le 30 août 2016

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Dans un référé rendu public le 29 août, la Cour des Comptes s’en prend une nouvelle fois à l’Agence de financement des Infrastructures de transports (Afitf), dont elle avait demandé en vain la suppression en 2009. Les magistrats financiers reprochent notamment à l’organisme d’être une « quasi-coquille vide » permettant au ministère des Transports de « s’affranchir des principes du droit budgétaire ».
La Cour des Comptes questionne le rôle de l’Afitf - Batiweb
Créée en 2004, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf) est chargée d’apporter la part de l’Etat dans le financement des infrastructures de transports. Elle « le dernier avatar des différents supports de l’Etat successivement créés depuis l’après-guerre pour tenter de garantir l’allocation pluriannuelle des ressources à ces investissements ».

Pourtant, si l’organisme créé a permis une débudgétisation massive, la Cour des Comptes souligne qu’il a failli à son objectif premier : « un pilotage pluriannuel des investissements dans le cadre d’une trajectoire financière maîtrisée ainsi qu’une orientation des financements de l’Etat vers les projets les plus créateurs de valeur pour la société ».

Une « quasi coquille vide »

Dans un référé adressé au Premier ministre le 10 juin 2016. Les magistrats financiers estiment que le rôle de l’Agence se limite à celui de caisse de financement. Sur le plan administratif elle est « une quasi coquille vide complètement dépendante du ministère des Transports, dans l’instruction des dossiers et l’organisation de son travail ».

Résultat : l’Afitf manque de marge de manœuvre réelle. « Il n’est qu’un organe d’exécution agissant comme un opérateur financier transparent et n’ayant dans les faits aucune autonomie décisionnelle ».

Les engagements financiers pris par l'Afitf ne font l'objet d'aucun plafonnement résultant de la loi de finances. Par ailleurs, l’Agence est un moyen pour le gouvernement de « s’affranchir des principes du droit budgétaire (…), près des deux tiers des recettes constituées en totalité de ressources fiscales et non fiscales que l'État lui affecte, étant reversées à l'État par voie de fonds de concours », pointe la Cour.

« Il en résulte une régulation par les crédits de paiement annuels conduisant à une déconnexion entre les engagements pris et les moyens réels de l'Afitf, alimentant le volume de restes à payer et les dettes de l'établissement », déplore la Cour.

La Cour demande à l’Etat de limiter ses engagements nouveaux

La Cour indique en effet qu’au 31 décembre 2015, le montant des restes à payer était de 11,86 milliards d’euros, une accumulation qui fait peser « de sérieux doutes sur la capacité de l’Afitf à faire face à ses engagements ».

En ne retenant que les paiements correspondant aux engagements budgétaires déjà pris, ainsi que les paiements liés aux contrats de plan 2015-2020, l’Afitf sera en déficit d’environ 600 millions d’euros en 2019, estime la Cour des Comptes.

Cette insuffisance de financement atteindrait même 1,6 milliard d’euros en y ajoutant les paiements correspondants à des engagements nouveaux en matières d’infrastructures tourières, ferroviaires, fluviales, portuaires et de transports collectifs. Et si l’Etat décidait de soutenir des projets tels que le tunnel ferroviaire Lyon-Turin et le canal Seine-Nord, le découvert pourrait s’élever à 4,7 milliards d’euros en 2019.

La Cour des comptes a ainsi demandé au gouvernement de définir des priorités de projets à venir et « réduire considérablement les engagements nouveaux ».

Il n’est donc plus question de supprimer l’Afitf comme l’avait sollicité la Cour des Comptes en 2009. Le référé vise surtout à souligner la nécessité d’une maîtrise de la trajectoire de financement dont l’Afitf a la responsabilité, la Cour des comptes ayant une nouvelle fois constaté « l’absence de plus-value apportée par cet opérateur de l’Etat ».

Le Premier ministre défend l’Agence

Dans une lettre adressée à la Cour des Comptes, le Premier ministre, Manuel Valls, a défendu cette agence qui a « réussi à s’imposer comme une véritable instance de décision qui permet d’associer les représentants élus et les représentants du Gouvernement ».

Bien que les interrogations de la Cour sur la soutenabilité budgétaire de l’Agence soient « légitimes », Manuel Valls souligne que les « chiffrages avancés dans le cadre du présent référé méritent d’être fortement nuancés ».

Le chef du gouvernement a affirmé que la hausse de 2 centimes de la taxe sur le gazole entrée en vigueur en 2015 « a permis de compenser la suppression des ressources issues de l'écotaxe poids lourds ».

Il a en outre souligné que les sommes restant à payer « ont fortement diminué notamment par une maîtrise du volume des autorisations d'engagement, inférieur au volume des crédits de paiement sur trois exercices consécutifs »

Enfin, d’après Matignon, sur les 11,9 milliards restant à payer fin 2015, « plus de 6 milliards » concernent des projets réalisés en partenariat public-privé qui seront payés « sur des durées supérieures à huit ans ».

R.C
Photo de une : ©Fotolia

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