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Efficacité énergétique : des outils de financement novateurs pour stimuler le marché

Publié le 18 février 2013

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Le groupe de travail dédié aux financements innovants de l’efficacité énergétique a remis son rapport autour de cinq idées fortes qui ont pour principal objectif de fixer un cap au marché et mettre en mouvement les acteurs.
Efficacité énergétique : des outils de financement novateurs pour stimuler le marché - Batiweb

Philippe Pelletier, président du Plan Bâtiment Durable, a confié en juin dernier à Inès Reinmann (Acxior Corporate Finance) et Olivier Ortega (Lefèvre, Pelletier & associés) le pilotage d’un groupe de travail dédié aux financements innovants de l’efficacité énergétique qui a rassemblé plus de 130 participants issus de l’ensemble de la filière de l’immobilier et de l’économie. Ces groupes, constitués de sous groupes, ont exploré les différentes pistes de financement de la modernisation durable du parc immobilier, « avec une attention particulière pour les solutions ne mobilisant pas de fonds publics », précise la lettre de mission de Philippie Pelletier. Objectif : trouver des moyens de financement innovants, indispensable à la montée en puissance du marché de l’efficacité énergétique et ainsi fixer un cap au marché pour mettre en mouvement les acteurs.

P. 2 : Le tiers financement : un nouveau mécanisme
P. 3 : Un chèque emploi efficacité énergétique pour les entreprises
P. 4 : Une entité pour le financement de la rénovation énergétique
P. 5 : Le potentiel inexploité de la densification
P. 6 : Faire émerger la « valeur bâtiment responsable » ou « valeur verte »



Le tiers financement consiste à proposer une offre de rénovation énergétique qui inclut le financement de l’opération et le suivi post-travaux, de telle sorte que le propriétaire n’a pas à financer les travaux car les économies d’énergies futures remboursent progressivement tout ou partie de l’investissement. Ce nouveau mode de financement serait complémentaire des financements existants. L’enjeu et l’intérêt principal du tiers financement sont probablement sa capacité à organiser l’investissement dans la rénovation énergétique à moyen et long terme, notamment grâce à son action de « tiers investissement ». Les acteurs parlent indifféremment ou presque de « tiers financement » ou de « tiers investissement ». Le groupe de travail propose de retenir les deux définitions afin de stabiliser la signification des termes.

Le groupe de travail souhaite aussi que les pouvoirs publics portent un discours clair sur la hausse inéluctable et progressive des coûts de l’énergie à horizon 2020 et 2030. En effet, la hausse des prix de l'énergie est un paramètre important dans l'efficacité du « tiers financement ». Ce mécanisme est aujourd’hui en phase d’expérimentation. Différents projets de « tiers financement » portés par des acteurs publics sont actuellement à l’étude ou en cours de déploiement en France. Les formes choisies peuvent être variables, avec en particulier : le modèle de la Société d’Économie Mixte (tiers-financeur sur le marché concurrentiel), le modèle de la Société Publique Locale (tiers financeur internalisé pour le secteur public), ou le tiers financeur sous forme de service public de l’efficacité énergétique (SPEE).

Le groupe a exploré les voies du soutien aux entreprises, particulièrement aux TPE-PME et préconise un meilleur accompagnement dans la création d’emplois et l’innovation. Deux mécanismes particuliers sont proposés : la création d’un chèque-emploi « efficacité énergétique » accessible aux ménages pour soutenir le financement de la main d’oeuvre des travaux de rénovation et la création d’une avance remboursable pour la formation et la création d’emplois.

Le chèque emploi emploi efficacité énergétique (C3E) a vocation à donner la possibilité à un particulier de payer une partie du coût de la main d’œuvre lié à la rénovation énergétique de son logement. Ce chèque serait complémentaire des autres aides. Il aurait aussi une fonction similaire avec le chèque-emploi service en donnant droit à un crédit d’impôts pour le particulier. Le C3E pourrait être financés également par les obligés des CEE.

Autre piste proposée, la création d’une avance remboursable de manière différée et échelonnée pour aider à la formation professionnelle, à l'embauche ou au maintien des emplois dans l'efficacité énergétique. L'accès serait conditionné à l'obtention de certifications telles que « Reconnu Grenelle de l'Environnement ». L'avance pourrait aussi concerner les industriels, pour des postes relatifs à des produits d'amélioration de la performance énergétique ou de la qualité environnementale des bâtiments.

Compte-tenu de l’éparpillement des initiatives, de la multiplication des labels, du flou concernant les systèmes de comptage d’économies, etc., il apparaît nécessaire pour le groupe de réunir l’ensemble des possibilités de financements innovants dans le cadre de la rénovation énergétique en un seul endroit et créer les conditions de l’amorçage. Car la rénovation énergétique des bâtiments nécessite des capitaux à long terme et avec des taux bas. En s’inspirant notamment de l’expérience de la banque KfW en Allemagne, le groupe propose de créer un véhicule public/privé capable d’émettre de la dette et d’être noté au plan national et international.

L’objectif premier du véhicule est d’accélérer les circuits de financement pour apporter les financements de long terme, peu chers, au plus proche des projets d’Efficacité Énergétique et des structures qui les portent. Le deuxième objectif est d’optimiser et d'accroître les ressources financières en combinant ressources existantes et ressources nouvelles à l’échelle nationale, sans engagement de nouveaux fonds issus du budget de l’État, ni accroissement de la dette publique. Le troisième objectif est d’organiser l’établissement d’un “track record” relatif aux projets d’efficacité énergétique afin de permettre de rassurer les investisseurs quant à la fiabilité des investissements.

Dans un contexte économique contraint, le groupe de travail s’est attaché à rechercher des recettes innovantes de financement de l’efficacité énergétique. Il souligne ainsi le potentiel de création de valeur immobilière par division parcellaire (densification horizontale) ou par surélévation de bâtiment (densification verticale) pour participer au financement de la rénovation énergétique. Le rapport pointe la rareté de ces projets qui rencontrent un certain nombre de difficultés (vides juridiques, inadaptations du droit, etc.). Dans le champ de la division parcellaire, la problématique est principalement la suivante : comment inciter la division parcellaire d’une résidence principale avec rénovation énergétique de l’existant ? Le rapport propose donc de lever les freins aux projets de densification lorsqu'ils sont liés à la réalisation de travaux de performance énergétique afin de renforcer cette ressource de financement.

Par ailleurs, des propositions sont faites pour sécuriser les recettes issues des économies d’énergie, afin d’accroître la solvabilité des maîtres d’ouvrage. Le rapport préconise d'améliorer les connaissances relatives à l'impact comportemental dans la consommation énergétique des bâtiments et à l'information et à la sensibilisation en vue d'agir sur le comportement des utilisateurs des bâtiments.

Le groupe de travail s'est accordé sur une chose en premier sur ce sujet : à l'instar de la RT 2012, il faut afficher le cap à tenir longtemps à l'avance pour soutenir l'émergence de la « valeur verte » et l'intégrer dès maintenant à la RBR 2020. L’émergence de cette valeur permettrait d’encourager les propriétaires à réaliser des investissements, puisque ceux-ci pourront être remboursés partiellement, totalement ou plus que totalement au moment de la revente du bien. L'émergence d'une « valeur verte » pourrait également progressivement être prise en compte pour l’accès au financement, considérant que les faibles consommations énergétiques d’un bâtiment efficace participent d’une sécurisation de la solvabilité des emprunteurs.

Autre point sur lequel les membres du groupe de travail s’accordent : le marché ne parvient pas à faire émerger rapidement par lui-même une valeur verte significative, une intervention publique est donc nécessaire. Celle-ci pourrait prendre différentes formes, en modifiant directement la valeur des actifs et/ou en jouant sur le contexte général de l’importance des critères environnementaux dans le domaine immobilier (discours, objectifs, réglementation...). Le groupe de travail propose de retenir le diagnostic de performance énergétique (DPE), tel qu’issu du “Plan de fiabilisation du DPE”, comme référence de principe pour la définition du bâtiment responsable, sauf dans les hypothèses où une certification aurait été obtenue (notamment pour les locaux d’activité). A noter que dans le secteur tertiaire privé, une « valeur verte » serait en train d’émerger en France actuellement pour certains segments et dans certains territoires.

Bruno Poulard

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