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Le Mont Saint Michel, les pieds dans l'eau dès 2012

Publié le 18 février 2008

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Rétablir le caractère maritime du Mont-Saint-Michel tout en améliorant les conditions d'accueil et d'approche des 3 millions de visiteurs par an...

Rétablir le caractère maritime du Mont-Saint-Michel tout en améliorant les conditions d'accueil et d'approche des 3 millions de visiteurs par an : tel est l'objectif du programme qui a démarré en 2006 et devrait s'achever en 2012. Après la mise en service du nouveau barrage, il faudra seulement 2 ans pour parvenir à déblayer naturellement la moitié des 3 millions de sédiments, et 8 ans pour arriver à 80 % de cet objectif.
Le Mont Saint Michel, les pieds dans l'eau dès 2012 - Batiweb
Piloté par le Syndicat mixte Baie du Mont-Saint-Michel, ce programme va libérer le Mont de l'emprise des sédiments – tangue – et des herbes qui l'enserrent, constitués de végétation qui tolère le sel. Il va également permettre de débarrasser le Mont des affreuses « verrues » que sont la digue-route actuelle et le parc de stationnement, afin de lui redonner son aspect insulaire d'antan. La présence intermittante de la mer redonnera aux grèves et aux chenaux une perception évoluant au gré des marées et des éclairages.

L'esprit souffle sur la baie

Inscrit au patrimoine mondial de l'Unesco en 1979, le Mont-Saint-Michel est indissociable de sa baie classée au titre des sites en 1987. Comme toutes les baies, celle-ci s'est peu à peu comblée par les sédiments que la mer dépose à chaque marée. Cette sédimentation, naturelle à l'échelle des temps, a été accentuée par les interventions humaines : poldérisation, réalisation de la digue-route, création de parkings sur les grèves, construction d'un barrage équipé de portes à flot... A brève échéance, le Mont menaçait de se trouver irrémédiablement accroché à la terre ferme, en pleine campagne, à jamais séparé de la mer.

En 1995, l'Etat et les Collectivités territoriales ont décidé de conjuguer leurs efforts pour mener le projet de rétablissement du caractère maritime du célébrissime îlot rocheux, et rendre ainsi à l'édifice, sa dimension de spiritualité. Le dessein formé était de rendre à cet ensemble architectural unique au monde sa beauté et son sens. Après plusieurs années de divergences, de concertation et d'études, le projet a obtenu, en juillet 2003 les autorisations nécessaires au démarrage des travaux, à la suite de l'enquête publique menée pendant l'été 2002.

4 axes majeurs

Pièce maîtresse de l'ensemble du programme, le barrage sur le Couesnon a quatre objectifs :
- générer des lâchers d'eau progressifs pour déplacer les sédiments le plus loin possible vers le large ;
- utiliser ainsi la force hydraulique des marées et du Couesnon pour déblayer les abords du Mont, des sédiments qui s'y accumulent depuis des décennies : un « désensablement » progressif de 3 millions de tonnes dans un périmètre limité autour du Mont, équivalent à 4 km2 sur les 43 ha de la baie ;
- créer un pont-promenade entre les deux rives du Couesnon,
- offrir un point de vue idéal sur l'îlot rocheux et la baie, grâce à un balcon maritime.

Le nouveau barrage dit « de la caserne », de type fluvio-maritime, est d'une grande sobriété architecturale : une simple ligne horizontale tracée dans un site grandiose.

Le balcon maritime est constitué d'un platelage en bois de forme curviligne de 900 m2.

8 vannes acier/inox

De 138 m de longueur, 16 m de largeur et 10 m de hauteur, le barrage comprend huit vannes indépendantes fabriquées en acier peint et inox avec de chaque côté une écluse à poissons de 3,10 m de largeur hydraulique. Tournées contre le Couesnon, ces vannes permettent les opérations de remplissage à marée montante – de 800 000 à 1 400 000 m3 selon les saisons et les coefficients – et de chasse d'eau à marée descendante. Chacune est actionnée par deux bras manœuvrés par un vérin fixé au génie civil des piles. Les vannes s'ouvrent par le haut, en surverse, et par le bas, en sous verse, selon le sens de la marée, pour redonner au Couesnon sa force nécessaire et chasser les sédiments déposés lors des marées montantes. L'ouverture hydraulique totale de 78,20 m est obtenue par la réalisation de 8 passes identiques de 9 m de largeur et 8 m de hauteur.

Le radier est un ensemble monolithique fondé sur pieux, d'une largeur de 24 m et d'une longueur de 99,60 m dont l'épaisseur courante est de 1,20 m. En fond de fosse d'effacement de la vanne, l'épaisseur est réduite à 1 mètre. Les piles sont au nombre de 9. Elles ont une longueur variable de 23 à 27 mètres suivant la cote considérée, et une largeur courante de 1,80 m, avec des surlargeurs en forme de partie de disques centrés sur l'axe des vannes de 0,10 d'épaisseur de part et d'autre de la pile, portant localement la largeur à 2 mètres. Le pont promenade est constitué d'une dalle pleine en béton armé horizontale prenant appui sur les piles, d'une longueur totale de 138,50 m et d'une largeur de 6 m.

Le barrage est équipé de deux types de bouchures mobiles :
- d'une part, chacune des 8 passes est dotée d'une vanne-secteur d'environ 67 m2 de section mue par des vérins hydrauliques solidaires des bras de vannes par l'intermédiaire de roues architecturées ;
- d'autre part, de deux écluses à poissons fonctionnant à l'aide d'une double vanne wagon à l'aval totalisant 15,50 m2 de bouchure mobile et d'une porte écluse amont sur laquelle sont embarquées deux vantelles plates servant aux écluses et, plus généralement, à la gestion hydraulique de ces ouvrages.

Des superstructures intégrées

L'ensemble des superstructures du barrage se veut discret et accueillant. Le balcon maritime, traité comme un ponton de bateau en platelage bois sur charpente métallique mécano-soudée offre une surface d'environ 910 m2. Il est porté par des consoles métalliques ancrées sur les piles en béton du barrage. C'est un espace ouvert au public, de détente et de découverte de la baie, au même titre que le pont-promenade.

Les gradins et les emmarchements d'une surface de 320 m2 forment une sorte d'amphithéâtre linéaire et assurent une continuité de circulation piétonne entre le balcon maritime, le pont promenade et les berges ; ils sont traités en éléments de bois fixés sur une charpente métallique mécano-soudée. Le garde-corps du pont promenade, fixé sur la rive amont et formant un coupe-vent, est constitué d'une allège en vitrage feuilleté reprise dans une ossature métallique.

Deux phases de chantier

Les travaux du barrage et des ouvrages d'accès ont commencé en 2006 et s'achèveront en principe en 2012. 28 mois de travaux sont prévus comportant deux phases pour la construction du barrage proprement dit. 12 000 à 15 000 m2 de béton sont nécessaires pour le génie civil, avec un approvisionnement en béton à partir de centrales situées à Pontorson et à Avranches. Le nouveau barrage est implanté à 20 mètres en aval de l'ouvrage existant, qui est conservé en phase chantier afin de continuer à réguler les crues et permettre la traversée du Couesnon par les entreprises. Les approvisionnements sont organisés depuis les principaux axes routiers – N 175 Avranches/ Saint-Malo – selon le principe d'un plan de circulation en boucle et à sens unique pour les véhicules de livraison.Le barrage est réalisé en deux moitiés pour travailler à sec et ne pas interrompre l'écoulement du Couesnon dans la baie. Le chantier est installé à l'abri d'une enceinte en palplanches ancrées dans le substratum, et stabilisée contre les poussées par une estacade formant un contrepoids chargé d'un lest de 1 000 tonnes.

En octobre 2007, radiers et piles de rive gauche sont achevés tandis que le montage des quatre premières vannes vient d'être terminé. La mise en service du premier demi-barrage interviendra fin 2007.Une opération similaire sera alors réalisée sur la rive gauche, la mise en service de l'ouvrage complet étant prévue pour la fin 2008.

Des chasses d'eau régulières pourront ainsi être réparties dans deux chenaux situés de part et d'autre du Mont et séparés par un seuil de partage dont le tracé sinueux favorisera les divagations du Couesnon. S'engouffrant dans ces chenaux, le courant sera suffisamment fort pour recréer un paysage maritime. Les ouvrages importants que constituent d'une part les tabliers, sont préfabriqués par CM Paimboeuf près de Caen, et les bras de vannes d'autre part, réalisés par Joseph Paris à Nantes, qui a également conçus les plans techniques de l'ensemble. Le dessin des vannes en acier galbé et de leurs bras en forme de sextant de marine a fait l'objet d'un soin tout particulier de la part de l'architecte et du maître d'œuvre. Sa beauté et son mécanisme d'entrée et de sortie d'eau seront uniques en Europe.

Une jetée vers le Mont

Actuellement les visiteurs, jusqu'à 30 000 par jour, garent leurs véhicules sur un parking de 15 ha aménagé sur des grèves et des prés submersibles. En haute saison, pour rejoindre le Mont, ils effectuent à pied, de 300 m à 1,8 km selon le lieu où ils se sont garés ou le coefficient de la marée. Demain, les visiteurs disposeront d'un parc de stationnement paysagé de 4 150 places, situé sur le continent à La Caserne, à 2,5 km de l'îlot rocheux et qui se fondra dans le site. Puis ils emprunteront au départ la digue-route remodelée dont le dernier kilomètre aura été supprimé pour se prolonger par un pont-passerelle s'incurvant vers l'ouest pour s'arrêter à 300 m des remparts. Une cale descendant en pente douce mènera les visiteurs à un terre-plein surmonté d'un gué submersible qui permettra de passer les derniers mètres séparant le pont-passerelle de la porte de l'Avancée. Ainsi, jusqu'au coefficient 95, l'entrée se fera comme aujourd'hui par la grande porte. Jusqu'au coefficient 103, l'accès sera assuré par sa petite porte latérale. Au-delà, un cheminement piétonnier aménagé dans les rochers permettra d'accéder intra-muros. Quelques jours par an, et pendant une heure environ, les très fortes marées recouvriront le gué, assiégeant totalement les remparts. La symbolique du Mont sera alors pleinement rétablie.

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