BTP : la culture de la prévention en nette progression selon l’OPPBTP
Publié le 21 octobre 2025, mis à jour le 21 octobre 2025 à 12h06, par Nils Buchsbaum

Les résultats de la nouvelle enquête nationale menée par L’Organisme Professionnel de Prévention du Bâtiment et des Travaux Publics (OPPBTP) en collaboration l’institut Viavoice révèlent une dynamique positive. Les entreprises du BTP se montrent plus exigeantes en matière de sécurité, les compagnons s’impliquent davantage, et la prévention des risques s’ancre de plus en plus dans le fonctionnement quotidien des chantiers.
« Cette nouvelle enquête menée auprès des dirigeants et des compagnons issus d’entreprises représentatives du secteur met en évidence des avancées notables dans la prise en compte de la prévention des risques professionnels dans le BTP », se réjouit Paul Duphil, secrétaire général de l’OPPBTP.
Cependant, la prévention ne progresse pas au même rythme partout. Les TPE, souvent isolées, peinent encore à structurer leur démarche. Si l’OPPBTP est désormais reconnu comme un partenaire de référence, l’ensemble de l’écosystème de la prévention reste encore peu connu des TPE et PME. Contrairement aux grandes structures, ces dernières privilégient une approche plus directe, en sollicitant un interlocuteur précis selon le besoin du moment.
La prévention, une responsabilité partagée
L’enquête révèle que les mentalités évoluent dans le BTP : la prévention des risques n’est plus perçue comme une contrainte, mais comme une responsabilité partagée. Près de 94 % des compagnons se sentent directement impliqués, et 59 % estiment que la prévention concerne aussi bien les chefs d’entreprise et de chantier que les compagnons eux-mêmes.
Les actions de prévention menées sur les chantiers sont globalement bien comprises et perçues comme pertinentes. 88 % des compagnons interrogés et 76 % des dirigeants estiment que ces actions sont adaptées et utiles à l’entreprise. Pour 87 % des compagnons et 60 % des dirigeants, elles sont faciles à mettre en œuvre. Enfin, 75 % des compagnons et 60 % des dirigeants considèrent qu’elles contribuent à améliorer la performance globale de l’entreprise.
La mise en place du Document Unique d’évaluation des risques professionnels (DURP), effective dans huit entreprises sur dix – un taux stable depuis 2016 – illustre la progression de la culture prévention dans le secteur. Toutefois, 79 % des entreprises reconnaissent le rédiger avant tout pour répondre à leurs obligations réglementaires.
Des différences entre grandes entreprises et TPE
La prévention s’ancre solidement dans les grandes entreprises, mais reste plus difficile à instaurer dans les TPE. Alors que 97 % des structures de plus de 50 salariés estiment que les actions de prévention sont adaptées et utiles à leur entreprise, ce chiffre tombe à 75 % dans les pour les entreprises de 1 à 9 salariés. Même constat pour la perception du lien entre prévention et performance : 88 % des grandes entreprises y voient un atout, contre 56 % des TPE.
Ces disparités se manifestent notamment dans la réalisation du DURP : 78 % des entreprises de moins de 10 salariés l’ont réalisé, contre 100 % des entreprises de plus de 50 salariés interrogées.
Dans les très petites entreprises, la prévention se gère encore souvent de manière ponctuelle, selon les situations et la motivation du dirigeant qui s’en tient généralement aux formations et habilitations obligatoires. À l’inverse, les grandes entreprises ont structuré leur démarche : la prévention y est « institutionnalisée », intégrée à tous les niveaux, soutenue par des services dédiés, des procédures formalisées et des pratiques partagées.
Un décalage entre la théorie et le terrain
L’enquête de l’OPPBTP souligne aussi un décalage ressenti par de nombreux compagnons entre les règles de prévention et les conditions réelles sur le terrain. Entre espaces exigus, équipements inconfortables ou mal adaptés, et une main-d’œuvre intérimaire parfois peu formée, les contraintes restent un frein à une application parfaite des normes.
Les formats de sensibilisation sont eux aussi jugés insuffisamment adaptés : trop théoriques, répétitifs, parfois infantilisants, et souvent conçus pour les dirigeants plutôt que pour les salariés. Les compagnons manifestent leur besoin de supports simples et concrets pour mieux réagir face aux situations imprévues ou non conformes.
Seuls six compagnons sur dix déclarent porter systématiquement leurs équipements de protection individuelle (EPI). Parmi ceux qui ne les portent pas toujours, 53 % les trouvent gênants, 39 % estiment qu’ils ne sont pas toujours nécessaires, et 25 % reconnaissent parfois les oublier. Parallèlement, de nombreux dirigeants restent focalisés sur le coût immédiat de la prévention, sans toujours en mesurer la rentabilité. Les délais serrés augmentent le niveau de risque, tandis que le manque de trésorerie freine l’achat ou le renouvellement des EPI.
Plusieurs leviers d'action pour renforcer la prévention des risques
L’OPPBTP propose plusieurs pistes d’action pour renforcer la prévention dans le BTP. Tout d’abord, mieux soutenir les TPE, encore peu intégrées à l’écosystème de prévention : seules 31 % d’entre elles considèrent l’OPPBTP comme leur interlocuteur principal, contre 83 % des grandes entreprises. Elles ont également souvent du mal à accéder aux informations pertinentes. Pour y remédier, l’OPPBTP prévoit de lancer une campagne d’information ciblée avec des supports pédagogiques simplifiés.
Par ailleurs, face à des besoins variés, l’organisme souhaite diversifier ses formats de communication en proposant vidéos courtes, des affiches pour les ateliers et modules interactifs sur les réseaux sociaux, afin de toucher tous les publics, notamment les plus jeunes.
Pour améliorer l’adhésion des équipes aux bonnes pratiques, notamment dans les petites entreprises, l’OPPBTP envisage de fournir des outils collaboratifs — applications ou livrets d’accueil — favorisant l’implication des salariés dans la gestion des risques.
Enfin, la prévention doit devenir un levier d’attractivité dans un secteur en difficulté de recrutement. Valoriser la sécurité, le bien-être au travail et la formation continue peut aider à séduire une nouvelle génération attentive à ses conditions de travail.
Les précieux résultats de cette nouvelle enquête doivent permettre d’affiner le prochain plan stratégique de l’OPPBTP, qui sera lancé dès l’année prochaine. Paul Duphil, secrétaire général de l’OPPBTP, affirme avec conviction : « Nous allons tenir compte des préoccupations et attentes des entreprises pour leur offrir un accompagnement optimal et atteindre ensemble notre objectif commun : réduire les accidents du travail. »
Par Nils Buchsbaum