Profiter de la rénovation de quartiers entiers, tels la "cité idéale" de Tony Garnier dans le 8e arrondissement de Lyon, pour leur donner vie en racontant la ville et ses habitants: ainsi est née l'idée de Cité Création. La première fresque, réalisée en 1987 sur 1.400 m2, fait revivre le travail des Canuts au XIXe siècle, ces ouvriers de la soie qui peuplaient alors la colline de la Croix-Rousse. "C'est cette oeuvre qui nous a apporté la notoriété", affirme M. Bensaïd, aujourd'hui à la tête d'une SCOP d'une douzaine de salariés basée à Oullins (Rhône), capable de mobiliser une cinquantaine de peintres en fonction des projets. "Pour financer nos oeuvres, on travaille sur commande et grâce au mécénat", explique-t-il en précisant que sa coopérative ne reçoit aucune subvention.

Parmi ses clients figurent autant des collectivités locales que des offices HLM ou des entreprises, telles Total qui lui a confié en 2001 l'"habillage" des cuves de sa raffinerie à Feyzin (Rhône), visibles le long de l'autoroute A7. "La particularité de nos oeuvres, c'est qu'elles sont adaptées à leur environnement urbain et qu'elles échappent à toute spéculation: une fois peintes, elles appartiennent à tout le monde", souligne le directeur de Cité Création.

Ce savoir-faire s'exporte bien. Des fresques "made in Lyon" sont visibles un peu partout dans le monde (Israël, Canada, Belgique...) et deux filiales existent déjà, l'une à Québec depuis 2000, l'autre à Berlin depuis janvier, en attendant Shanghai. Prochaine consécration: l'inauguration à Lyon le 4 décembre de trois fresques rendant hommage au grand peintre mexicain Diego Rivera, à l'occasion du 50e anniversaire de sa disparition, qui s'ajouteront à la soixantaine déjà existantes dans la capitale des Gaules. Le phénomène culturel est tel que des circuits touristiques, intitulés "de murs peints en trompe-l'oeil", sont organisés. "Après Fourvière et le Vieux-Lyon, c'est la troisième visite la plus demandée", explique-t-on à l'office du tourisme.

"Dans n'importe quel guide consacré à Lyon, les fresques murales occupent une bonne place: au même titre que la fête des Lumières (le 8 décembre), elles sont devenues emblématiques de la ville", renchérit M. Bensaïd. "C'est simple, ajoute-t-il, pour moi, elles sont plus célèbres que nos saucissons lyonnais, la rosette et le jésus !".