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A l'île de Ré, le combat des riches malgré eux contre l'ISF

Publié le 08 mars 2007

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Des habitants de l'île de Ré assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour cause de flambée de la valeur de leurs terres dénoncent un impôt qui menace la survie du patrimoine de l'île où le mètre carré constructible vaut de 700 à 2.000 euros.
Tout oppose a priori le célèbre exilé fiscal Johnny Hallyday et ces agriculteurs rétais solidement ancrés à leur île au large de La Rochelle. Ils se sont pourtant trouvé une bataille commune: l'ISF, dû par les personnes dont le patrimoine excède 750.000 euros.
L'ISF concerne 400.000 foyers fiscaux en France, un chiffre en forte hausse en raison de la flambée des prix de l'immobilier. A l'île de Ré, le phénomène a pris de plein fouet - et parfois par surprise - des propriétaires terriens situés en zone constructible. La hausse des prix de l'immobilier a atteint 10 à 15% par an ces trois dernières années sur l'île, accroissant le nombre de ceux qu'un élu rétais qualifie de "riches malgré eux".

Solange Massé, 56 ans, ne peut ainsi masquer son dépit en montrant le champ de pommes de terre primeurs situé derrière sa maison de Sainte-Marie-en-Ré, sur un terrain de 3.000 m2 de terrain hérité de sa mère. "Notre récolte de pommes de terre, c'est pour payer l'ISF", affirme-t-elle. Solange et son mari, propriétaires d'une autre petite maison, doivent 3.710 euros d'ISF pour un patrimoine déclaré de 1,4 million d'euros. Et ce alors que leurs revenus mensuels, issus de l'exploitation d'une vigne qu'ils louent, sont "de l'ordre de 1.000 euros".

René Massé, 80 ans, sans lien de parenté avec Solange, raconte pour sa part qu'il a été obligé de vendre un terrain pour régler l'ISF. S'il ne dit pas combien la vente lui a rapporté, cet ancien viticulteur regrette d'avoir malgré lui contribué au développement de la construction: quatorze maisons s'élèvent aujourd'hui sur son ancien champ de 5.200 m2. L'octogénaire possède un autre terrain - un champ de 6.300 m2 en zone constructible - et une maison à La Couarde. Un patrimoine qui lui vaut de payer 16.000 euros d'ISF, alors que sa femme et lui perçoivent 1.180 euros par mois au titre de leur retraite.

L'Association de défense des habitants de l'île de Ré (Adhir), à l'origine de la notoriété du "syndrome de l'île de Ré", mène depuis deux ans un lobbying appuyé pour la "remise à plat" de l'ISF. "C'est un système qui fait partir les anciens, et qui fait qu'ils ne peuvent transmettre leur culture et leur patrimoine", explique Valérie Constancin, présidente de l'Adhir.

"Il faut sortir le logement principal de l'ISF", plaide-t-elle, affirmant que "personne ne rentrait dans la réforme du bouclier fiscal". Léon Gendre, le maire de La Flotte, une commune de l'île, nuance toutefois la situation. "Les Rétais aujourd'hui assujettis à l'ISF sont quand même extrêmement chanceux car ils sont propriétaires de terres agricoles devenues constructibles, alors que d'autres possèdent des terres non constructibles qui valent 1 euro le m2", rappelle-t-il.

Sur le fond, Vincent Drezet, secrétaire national du Syndicat national unifié des impôts (SNUI), estime pour sa part qu'on utilise ce "syndrome" comme d'un "cheval de Troie" pour contester l'ISF dans son ensemble. "Dans l'opinion nationale, l'ISF semble ainsi absurde parce qu'il touche des gens qui gagnent peu, note-t-il. Mais toute la fiscalité sur le patrimoine contribue à redistribuer les richesses et à réduire les inégalités, ce qui est, rappelons-le, l'un des rôles de l'impôt."

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