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Accessibilité : certains établissements pourront déroger à la règle, l'APF envisage un recours

Publié le 07 novembre 2014

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Le 6 novembre dernier, quatre décrets ont été publiés au JO pour fixer les nouvelles dispositions en matière d'accessibilité des transports et des établissements recevant du public. Ces décrets détaillent à la fois le fonctionnement des Ad'AP et établissent surtout les nouvelles possibilités de dérogation. Réactions de Nicolas Merille, conseiller national accessibilité à l'APF.
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L'Association des paralysés de France et ses membres se sentent « trahis », le gouvernement vient de publier au Journal Officiel quatre décrets qui définissent les grandes lignes de la politique d'accessibilité, « loin, bien loin des ambitions de la loi Handicap du 11 février 2005 », selon Nicolas Merille, conseiller national accessibilité à l'APF.

« Ces décrets déclinent l'ordonnance du 26 septembre qui était déjà catastrophique. Non seulement, on a perdu une première bataille avec le report des délais mais on a aussi perdu d'autres droits au fil du temps », s'indigne le conseiller national accessibilité à l'APF.

Les transports

Les deux premiers décrets le n°2014-1321 et le n° 2014-1323 fixent les dispositions en matières de transport, notamment « les conditions de détermination des points d'arrêt à rendre accessibles de manière prioritaire » et «précise également la notion d'impossibilité technique avérée, conduisant à exclure de l'obligation d'accessibilité un point d'arrêt satisfaisant aux critères de priorités.» 

« Dans le cas présent, on a perdu le droit au transport, commente Nicolas Merille. Initialement, tous les points d'arrêts dans le service public des transports devaient être rendus accessibles, sauf en cas d'impossibilité technique. Dorénavant, seuls les points d'arrêts jugés prioritaires seront rendus accessibles. Concrètement, au lieu d'avoir toutes les lignes accessibles, on en aura peut-être que la moitié ou le tiers. Et en plus, les autorités organisatrices de transport ne seront pas obligées de déposer un Ad'Ap contrairement aux gestionnaires d'ERP».

Les Ad'Ap

Le troisième décret n°2014-1327 du 5 novembre 2014 permet l'entrée en vigueur d'un outil spécifique : l'agenda d'accessibilité programmée (Ad'Ap), et définit son contenu.

Cet Ad'Ap permet ainsi de prolonger, au-delà de 2015, le délai permettant d'effectuer les travaux de mise en accessibilité des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public, en contrepartie de la mise en place d'un dispositif de suivi de l'avancement des travaux prévus, qui peut amener à sanctionner, dans le cadre d'une procédure de carence, les manquements aux engagements pris par le signataire dans l'agenda. Comme prévu par l'ordonnance du 26 septembre, ces Ad'Ap peuvent s'échelonner sur 3, 6 ou 9 ans, selon le type d'établissement.

« Un recul énormissime, souligne Nicolas Merille, d'autant que l'amende est insignifiante pour ceux qui ne respecteraient pas leur Ad'Ap ».

Modification du code de la construction

Quant au dernier décret n° 2014-1326 du 5 novembre 2014, il modifie les dispositions  du code de la construction et de l'habitation relatives à l'accessibilité aux personnes handicapées des établissements recevant du public et des installations ouvertes au public.

Quatre dérogations pourront ainsi être accordées par le préfet du département :

1) En cas d'impossibilité technique résultant de l'environnement du bâtiment, notamment des caractéristiques du terrain, de la présence de constructions existantes ou de contraintes liées au classement de la zone de construction, notamment au regard de la réglementation de prévention contre les inondations ou en raison de difficultés liées à ses caractéristiques ou à la nature des travaux qui y sont réalisés ; 

2 ) En cas de contraintes liées à la conservation du patrimoine architectural dès lors que les travaux doivent être exécutés ;

3) Lorsqu'il y a une disproportion manifeste entre les améliorations apportées par la mise en œuvre des prescriptions techniques d'accessibilité, d'une part, et leurs coûts, leurs effets sur l'usage du bâtiment et de ses abords ou la viabilité de l'exploitation de l'établissement, d'autre part, notamment ;

4) Lorsque les copropriétaires d'un bâtiment à usage principal d'habitation existant au 28 septembre 2014 réunis en assemblée générale s'opposent, dans les conditions prévues par 'article 24 de la loi n°65-557 du 10 juillet 1965
fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, à la réalisation des travaux de mise en accessibilité d'un établissement recevant du public existant ou créé dans ce bâtiment. Lorsque ce refus est opposé à un établissement recevant du public existant dans ce bâtiment, la dérogation est accordée de plein droit. 

L'APF riposte

« La loi du 11 février était bien mieux équilibrée. Nous nous sentons plus qu'abandonnés, nous sommes vraiment écoeurés et furieux, tempète Nicolas Merille. C'est un recul énorme surtout sur le quatrième motif. Il y a beaucoup d'ERP qui sont situés dans des copropriétés comme les cabinets médicaux, les cabinets d'avocats ou de notaires etc. Avant, les assemblées de copropriétaires avaient une obligation de moyens, c'est-à-dire qu'ils devaient au moins étudier la faisabilité de la mise en accessibilité. Ce n'est plus le cas avec ce décret ».

Enfin, le conseiller national accessibilité à l'APF n'hésite pas à dénoncer de « graves abus dans la communication du gouvernement » sur le sujet de l'accessibilité : « tout est fait pour laisser entendre que les associations sont d'accord parce qu'elles ont participé aux réunions de concertation. Or, concertation ne veut pas dire consensus ».

Pour preuve, l'APF envisage d'attaquer l'ordonnance au Conseil d'Etat et demande aux parlementaires de ne pas ratifier l'ordonnance avant que le gouvernement revoit sa copie. Un collectif inter-associatif « pour une France accessible pour tous » a également été créé, et regroupe déjà une vingtaine d'associations.

Claire Thibault

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