Les friches, un gisement foncier stratégique pour le logement et l'industrie

La France compte près de 15 000 friches, soit l'équivalent de 60 000 hectares, selon l'inventaire national 2025 publié par le Cerema. Ces espaces délaissés constituent en réalité un gisement stratégique pour l'aménagement.
Dans un contexte de sobriété foncière imposée par la loi Climat et résilience, qui vise le « zéro artificialisation nette » (ZAN) d'ici 2050, leur requalification apparaît comme l'un des leviers majeurs pour répondre à la fois aux besoins en logements, au développement économique et à la transition écologique.
La mise en place de la plateforme Cartofriches permet désormais de localiser et qualifier ces sites à l'échelle nationale, avec l'ambition de mieux les mobiliser.
Un inventaire révélateur de nouvelles opportunités
L'étude du Cerema révèle la diversité des friches recensées : 33 % sont liées à l'habitat, 22 % à l'industrie, mais ces dernières concentrent à elles seules la moitié des surfaces totales. On compte aussi 10 % de friches commerciales, 5 % issues d'équipements publics et 5 % de terrains ferroviaires.
Dans les faits, deux tiers des sites dépassent 0,5 hectares, ce qui en fait des fonciers adaptés à des opérations d'envergure, qu'il s'agisse de reconversion urbaine, d'accueil d'activités économiques ou de projets de renaturation.
Un tiers des friches se situent en zones dites « tendues » pour l'habitat, là où la pression foncière est la plus forte et où la rareté du terrain bloque souvent les projets immobiliers. Le potentiel est donc considérable : sur les friches sans projet en cours, environ 4 500 sites, représentant 37 000 hectares, pourraient accueillir de l'industrie, et 3 000 autres, couvrant 2 000 hectares, sont identifiés comme propices au logement.
Ces chiffres mettent en lumière un paradoxe : alors que la France consomme chaque année environ 20 000 hectares d'espaces naturels, agricoles ou forestiers, des milliers d'hectares déjà artificialisés restent inutilisés.
Un levier pour la réindustrialisation et le logement
Si la remise en état d'une friche représente un coût important, estimé par le Cerema à 540 000 euros par hectare, elle constitue un investissement stratégique. Entre 2021 et 2024, le financement apporté par le plan de relance et le Fonds vert a déjà permis de réhabiliter 5 800 hectares, produisant 13,6 millions de m² de logements et 10,3 millions de m² de surfaces économiques.
Ces chiffres montrent que la reconversion des friches est non seulement possible, mais déjà en cours. Celle-ci répond aux enjeux actuels : loger des populations croissantes, accueillir des activités productives et limiter la pression sur les espaces naturels.
Le Cerema souligne également que 28 % des friches recensées font déjà l'objet d'un projet de transformation, preuve que les collectivités et les acteurs privés s'approprient progressivement cet outil.
La requalification de ces sites, souvent situés en cœur de ville ou en périphérie directe, permet aussi de redonner vie à des quartiers, d'effacer des stigmates urbains et de recréer des centralités attractives.
Des outils pour accélérer la transformation
Pour accompagner les porteurs de projets et les collectivités, le Cerema a développé plusieurs solutions complémentaires à l'inventaire. La plateforme UrbanSIMUL permet de constituer des observatoires locaux et de croiser les données avec les besoins d'aménagement. L'outil France Foncier+ identifie le foncier économique disponible, tandis que UrbanVitaliz accompagne les collectivités dans la transformation des sites les plus complexes, en intégrant les enjeux juridiques, techniques et financiers.
Ces dispositifs visent à réduire les obstacles opérationnels qui freinent encore la reconversion des friches, en particulier dans les territoires où les moyens humains et financiers sont limités.
L'enjeu est d'autant plus fort que 13 000 terrains supplémentaires, susceptibles d'être qualifiés de friches, ont été identifiés : un potentiel qui pourrait porter la surface totale mobilisable entre 80 000 et 140 000 hectares.