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La construction biosourcée à l'épreuve du risque incendie

Publié le 25 mars 2024

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Pendant longtemps, les bâtiments construits à partir de matériaux biosourcés, d’origine végétale ou animale, étaient liés à un risque accru d'incendie. Un préjugé qui ne reflète pourtant pas la réalité. En effet, ces constructions, comme toutes les autres structures, sont soumises à des normes rigoureuses en matière de sécurité incendie. Explications.
La construction biosourcée à l'épreuve du risque incendie - Batiweb

Alors que les matériaux biosourcés, notamment le bois, connaissent un regain d'intérêt dans la construction, leur utilisation suscite encore de nombreuses interrogations quant à leur réaction au feu.

 

Les matériaux biosourcés face aux préjugés

 

L'un des matériaux biosourcés les plus étudiés est le mélange de chanvre et de chaux. Des essais réalisés sur ces mélanges ont démontré une grande résistance au feu, dépassant largement les attentes. « Bien que certains matériaux puissent se consumer sur une longue durée en cas d'incendie, les mélanges appropriés permettent de limiter la propagation des flammes», introduit Laurent Arnaud, directeur du département Bâtiments durables au sein du CEREMA.

Toutefois, « il est important de noter que même si ces matériaux peuvent résister au feu pendant une période prolongée, ils peuvent continuer à se consumer lentement », souligne Stéphane Foulon, directeur technique chez Coquart, spécialiste de la construction à ossature bois.

Il n'empêche que l'utilisation de matériaux biosourcés, tels que la paille ou le bois, dans la construction présente de nombreux avantages, tant en termes de durabilité que d'efficacité énergétique. « Les bâtiments à ossature bois et en paille bénéficient d'une bonne résistance au feu, sous réserve du respect des normes et des réglementations en vigueur », précise-t-il. À titre d'exemple,  la construction d'établissements recevant du public (ERP), des normes strictes en matière de résistance au feu doivent être respectées, et les constructeurs doivent adapter leurs produits en fonction des exigences réglementaires pour pouvoir intégrer des isolants et des matériaux résistants au feu. 

Malgré ces avancées, des défis persistent, notamment en ce qui concerne la perception du risque lié aux matériaux biosourcés. « Les constructeurs doivent faire face à des préjugés et à des réticences, notamment en raison de la méconnaissance du grand public sur ces nouvelles techniques de construction », déplore Stéphane Foulon. 

Ainsi, les constructeurs spécialisés dans les ossatures bois, par exemple, mettent en place diverses mesures pour minimiser les risques d'incendies. Car, contrairement aux idées reçues, « le bois n'est pas nécessairement un matériau inflammable s'il est utilisé de manière appropriée », indique Stéphane Foulon. 

Cependant, l'engouement croissant pour les bâtiments à haute performance énergétique et à faible impact environnemental laisse entrevoir « un avenir prometteur » pour les matériaux biosourcés dans le secteur de la construction, se réjouit le directeur technique. Par ailleurs, l'utilisation de matériaux comme le bois brûlé, inspiré de la culture japonaise, offre une protection supplémentaire contre les incendies grâce à sa couche carbonisée.

 

Quid de la réglementation ?

 

Au niveau législatif, des mesures sont prises pour se prémunir contre les risques d'incendies. « Les autorités compétentes, notamment les préfectures, sont autorisées à élaborer des plans de prévention des risques d'incendies au niveau local »,indique Daniel Tasciyan, avocat en droit public. 

Concrètement,ces plans permettent parfois d'interdire la construction dans certaines zones particulièrement exposées aux risques d'incendies, même si le terrain est potentiellement constructible. Les secteurs concernés par ces mesures sont souvent situés près des forêts, en particulier dans les régions méditerranéennes, où les risques d'incendies sont plus élevés, notamment en raison de conditions arides favorisant la propagation du feu.

« Divers facteurs entrent en jeu pour déterminer l'inconstructibilité dans ces zones à risques. Parmi ceux-ci, on peut citer l'accessibilité pour les services de secours, tels que les hélicoptères et les camions de pompiers. L'insuffisance en matière d'équipement, comme l'absence de réseaux d'eau suffisants, peut également influencer les décisions d'interdiction de construire », explique l'avocat.

Au niveau national, chaque secteur est susceptible de faire l'objet d'une interdiction de construire en fonction de son niveau de risque. « Avec l'accent mis sur la prévention des risques d'incendies, notamment dans le contexte du changement climatique, il est probable que les réglementations continueront à évoluer pour tenir compte de ces défis croissants », poursuit-il.

Les avocats spécialisés en droit public jouent ainsi un rôle important en conseillant les clients confrontés à des refus de permis de construire. « Notre travail consiste à examiner les documents existants, tels que les plans de prévention des risques d'incendies, et à proposer des solutions pour respecter les normes et obtenir les autorisations nécessaires. En collaboration avec les architectes et les experts en sécurité incendie, nous pouvons contribuer à concevoir des projets répondant aux exigences réglementaires tout en minimisant les risques d'incendies », développe maître Tasciyan.

En cas de refus de permis de construire, « il est possible de contester la décision devant le juge administratif ou de revoir la demande en tenant compte des motifs de refus », conclut-il. Une démarche qui peut être répétée jusqu'à ce que la demande soit acceptée, sans limite quant au nombre de tentatives.

 

> Consulter le dossier spécial bâti et risques naturels

 

Propos recueillis par Marie Gérald

Photo de une : Adobe Stock

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