Le Quartier Latécoère, un projet signé Brenac & Gonzalez et Associés

Latécoère est une institution toulousaine datant du début du XXe siècle, qui doit son existence à Pierre-Louis Latécoère, l'inventeur de l'hydravion. Ce dernier a acheté une briqueterie située au milieu des champs pour y implanter son usine. Petit à petit l’activité s’est développée et s’est étendue pour englober les 6 hectares de terrain. « La ville s'est construite autour d'une parcelle complètement délimitée, et d'une certaine manière dans des temporalités extrêmement différentes », raconte Jean-Pierre Lévêque, l’un des associés de Brenac & Gonzalez & Associés, qui souligne par ailleurs : « Au sud, nous avions des grands ensembles qui datent des années 1970-1980 et qui peuvent monter jusqu'à R+10, et au nord, un tissu pavillonnaire, donc des maisons à très petite échelle. Ce grand territoire de 6 hectares au cœur de ce quartier, c'est juste énorme ». C’est dans un contexte particulier et très caractéristique, suite à la disparition du site industriel de Latécoère qu’interviennent les architectes de l’agence parisienne aux projets variés et références multiples. Pour ces derniers, densifier la ville est synonyme d’amélioration de la mobilité, de diminution des temps de transports, de mutualisation des équipements, tout en luttant contre l’étalement urbain.
©David Aubert
L’agence parisienne Brenac & Gonzalez & Associés est ainsi mandatée pour la transformation du site Periole, propriété originelle de Latécoère, qui s’étend sur plus de 5 hectares. « L'idée était d'avoir des accès fluides, et de libérer du foncier. Nous avons proposé à la fois un projet urbain et puis des projets architecturaux concernant le siège de Latécoère et les futurs îlots à bâtir. Ce qui nous a vraiment passionnés dans ce sujet, c'est cette espèce de pièce manquante d’un puzzle qu'il fallait reconstituer », explique Jean-Pierre Lévêque. L’opération est complexe, le geste délicat et le résultat est à la hauteur des attentes. Forts de leur expérience, les architectes ont su approfondir les recherches, se baser sur l’histoire pour ajuster le neuf à l’existant et retravailler la mixité.
©David Aubert
Le programme tertiaire, à savoir le siège de Latécoère, accompagné d'un équipement collectif pour Latécoère, appelé « la maison de services ». Il s’agit d’un pavillon situé dans le parc que les architectes ont dessiné et qui accueille les cafés, les restaurants d'entreprise, les salons VIP, le fitness ainsi que toutes les commodités liées à l'activité tertiaire. Le reste du programme, consiste, quant à lui à l’élaboration d’immeubles de logement social et en accession, où les assises des bâtiments sont organisées autour d'activités de services comme un laboratoire, un cabinet de kinésithérapeute, en plus d’une résidence sénior qui vient se greffer à ce programme mixte. Ce dernier, couvrant les 6 hectares, est découpé en trois phases, dont la phase une est terminée. La phase deux concernera les logements sociaux et en accession, avec d’autres idées qui pour le moment ne sont pas encore figées.
©David Aubert
Jean-Pierre Lévêque explique que les hangars de construction qui existaient sur le site étaient à l'échelle industrielle, donc les architectes étaient dans l’incapacité de garder certains de ces bâtiments. « Sur la phase 1, par exemple, qui fait 25 000 m² de surface de foncier, nous avions un hangar qui faisait 10 000 m² d'un seul tenant. Et le reste des 25 000 m² était entièrement asphalté ». De ce fait, la réhabilitation ne pouvait pas servir aux futures intentions. Néanmoins, l’associé de l’agence parisienne précise que le projet consistait également en une renaturation de la totalité du site. Rappelons que sur la phase 1B, au niveau des logements, le projet a reçu le label Biodiversité. En effet, il y a eu un travail de dépollution des sols conséquent pour rendre la nature du sol compatible avec les programmes à y implanter. « Nous avons procédé à la renaturation complète en construisant un parc arboré avec des noues, des zones humides, en plein cœur de Toulouse. Nous avons travaillé avec TN+ sur toute la partie du siège de Latécoère et avec la paysagiste Julie Poirel pour toute la partie de la phase 1B ».
©David Aubert
La phase 1 avec le siège de Latécoère et les logements ainsi que la résidence senior a été livrée. Les architectes ont accompli un travail de couture urbaine qui repose sur l'articulation des échelles. « Nous nous sommes attachés à trouver sur le sud de la parcelle, sur la rue de Periole, des échelles assez hautes qui peuvent monter jusqu'en R+8, R+9, voire même R+10, puisqu'on a des duplex dans les derniers niveaux, pour descendre sur des échelles très basses côté nord, où on oscille entre le rez-de-chaussée et le R+3 », souligne Jean-Pierre Lévêque. En effet, les ensembles fonciers de haute taille que les architectes appellent « les bastides » prennent place à la périphérie bâtie et viennent refermer les îlots. Le programme s’adapte et se complète avec des maisons individuelles accessibles directement depuis l'extérieur. Jean-Pierre Lévêque rappelle qu’il s’agit d’une correspondance des échelles, mais également d’une correspondance des usages. Les îlots, à travers leurs larges failles, continuent ainsi à établir un lien avec la ville, tandis que l’intimité des habitants est garantie. Les ouvertures permettent d'avoir des enfilades, des points de vue filant au travers de l'espace urbain. Ces ensembles peuvent être traversés pendant la journée librement et puis fermés à partir de 18h. Par ailleurs, les cœurs d'îlots comportent des programmes particuliers de salles d'activités pour tous les occupants, avec notamment des interventions artistiques.
©David Aubert
« C'était une très belle expérience parce que ça nous a permis de mettre en pratique notre appétence pour les différentes échelles. Ce qui caractérise notre travail, c'est tout à la fois une attention au macro, c'est-à-dire à ce qui concerne l'urbain, et une attention particulière aux personnes qui habitent nos bâtiments, en donnant une très grande importance à la question du détail ». Rappelons que l’agence d’architecture parisienne avait déjà pratiqué ce genre d’exercice au cours de la conception du Macro lot B4 à Boulogne-Billancourt, où les architectes avaient été confrontés à des échelles différentes, mais à Toulouse, le territoire est encore plus vaste. La phase 2 sera initiée au cours de 2025. L’intervention de Brenac & Gonzalez & Associés sur le quartier Latécoère met en avant une grande méthodologie qui a réussi à articuler les échelles du site en les reconnectant au quartier, tout en mettant en place une continuité paysagère qui caractérise le site. C’est un travail de longue haleine qui a donné ses fruits !
Sipane Hoh
Photo de une : ©David Aubert