Bâtiment francilien : alerte sur les permis de construire et la rénovation

Fin juin, la Fédération Française du Bâtiment (FFB) annonçait une « éclaircie » au premier semestre 2025 dans l’activité bâtiment. Les chiffres ne sont toutefois pas au beau à fin mars, côté FFB Grand Paris Île-de-France.
Logement neuf : les permis annoncent « une année 2026 insuffisante »
Sur Paris et la petite couronne, les mises en chantier tombent à 46 800 unités, soit -0,2 % comparé à fin mars 2024, voire -21,3 % comparé à la même période en 2023.
« Les logements démarrés entre fin mars 2024 et fin mars 2025 restent bien en dessous des besoins régionaux. On ne le répondra jamais assez. On est entre 60 000 et 90 000 logements nécessaires à l'Île-de-France», rappelle Edouard Durier, vice-président en charge des affaires économiques de la FFB régionale.
Côté logements autorisés, les chiffres sont moins reluisants (52 500 unités), aussi bien en glissement annuel (-7,9 %) que comparé aux niveaux d’il y a deux ans (-26,1 %). « Ça annonce une année 2026 insuffisante, évidemment, parce que les permis qui sont délivrés aujourd'hui, le temps de réaliser les appels d'offres, permettent les constructions de 2026 », commente M. Durier, qui ne voit pas encore d’ « effet positif » sur le PTZ élargi. C’est pour cette raison que son maintien jusqu’en 2027, défendu par la FFB nationale, est également soutenu par la FFB Grand Paris Île-de-France.
Autre mesure encouragée par l’antenne francilienne : la création d’un statut de bailleur privé, aussi proposé dans un rapport parlementaire pour relancer l’investissement locatif. L’idée n’est « non pas pour faire des propriétaires riches qui ont plusieurs appartements ou des marchands de sommeil, qui ont des logements à louer. Mais plutôt pour relancer l'investissement locatif et la possibilité pour les franciliens de se loger sans avoir forcément besoin d'investir dans l'achat d'un logement », affirme Edouard Durier.
Le non-résidentiel porté par le bâtiment public
L’embellie se profile un peu plus du côté des locaux non résidentiels, avec 2 491 m2 commencés à fin mars. Les surfaces progressent ainsi de 3,3 % sur un an, contre -29,5 % à mars 2023. « C'est un chiffre qui est positif », estime Edouard Durier, bien que l’activité ne soit pas revenue à « un niveau qui nous satisfait ».
L’activité est davantage tirée par le bâtiment public (+11,8 %) que par les bureaux (-25,3 %), alors que la vacance est très forte en Île-de-France, y compris à Rueil-Malmaison et à Saint-Denis.
Conséquence : les permis de construire attribués pour des locaux non résidentiels reculent de 3,1 % à 3 847 m2, après -18,3 % entre mars 2023 et mars 2024. En sachant « qu'il va y avoir les municipales l'année prochaine, et que quand on rentre en période électorale municipale, on arrête de couler du béton », précise le vice-président en charge des affaires économiques de la FFB Grand Paris-Île-de-France.
« Il y a de grosses réflexions sur la transformation de bureaux en logements, proposées aux collectivités qui, là encore, ont besoin de fonds pour mettre en route ces opérations-là, ce qui leur manque un petit peu en ce moment », mentionne-t-il.
Pour la construction neuve au global, la FFB Grand Paris Île-de-France, veut moins d’exigences sur de la RE2020 pour l’échelon 2028-2031. Tant pour endiguer la complexité et la hausse des coûts potentielle, qui peut rétracter la maîtrise d’ouvrage et donc la demande.
Le foncier est aussi une thématique clef, alors que la loi TRACE tend à alléger les obligations de zéro-artificialisation nette (ZAN) des sols. Les projets mixtes, pour éviter la consommation urbaine et éviter l’étalement urbain, font partie des solutions plébiscitées. Attention toutefois à « bien y réfléchir avec les utilisateurs ou les [acteurs] déjà présents dans les zones », avertit Edouard Durier.
L’entretien-rénovation perturbé par l’avenir incertain de MaPrimeRénov’
Que dire également de la rénovation dans le Grand Paris, qui décline de 2,6 % entre le T1 2024 et le T1 2025. Il s’agissait pourtant d’une activité stable de 2023 à 2024 (+0,3 %).
L’enjeu est pourtant de taille à Paris et en petite couronne, alors que les habitants sont non seulement préoccupés par le confort d’hiver, mais aussi d’été. « Nous avons des Franciliens qui n'arrivent pas à être dans des logements décents pour se rafraîchir », s’inquiète le vice-président en charge des affaires économiques de la FFB Grand Paris Île-de-France.
Ces derniers chiffres ne seraient-ils pas « une conséquence du marasme dans lequel le gouvernement nous met depuis le début de l'année ou depuis l'an dernier ? », s’interroge Edouard Durier. Le tumulte autour de MaPrimeRénov’, entre coup de rabot budgétaire et flou réglementaire, n’a sûrement pas aidé…
Nul doute que la suspension temporaire de l’aide à la rénovation énergétique risque d’accroître l’incertitude. Même si le dispositif est maintenu pour le mono-geste, la grande simplification reste son principal chantier.
« J'entendais hier justement un propriétaire qui disait qu’il avait voulu mettre en route MaPrimeRénov’, mais que c'était tellement compliqué qu’il avait finalement acheté un climatiseur », déplore M. Durier.
En ce qui concerne la lutte contre la fraude, une des raisons de l’interruption de MaPrimeRénov’ pour les rénovations globales, la FFB Grand Paris Île-de-France réitère une mesure : la franchise de TVA à 25 000 euros pour les micro-entrepreneurs.
Si ce statut est « très bien pour se lancer », « trop de gens utilisent ce système pour finalement durer en temps et ça crée un certain déséquilibre entre les auto-entrepreneurs et les artisans que nous représentons aussi très fortement », explique Edouard Durier. « Donc nous estimons que 25 000 euros est un seuil qui nous paraît relativement correct, pour que les auto-entrepreneurs puissent se lancer et ensuite passer sous statut artisan », justifie-t-il.
-1,2 % pour l’emploi bâtiment en Île-de-France
À Paris et en petite couronne, l’emploi salarié décroche de 1,2 % entre le T1 2024 et le T1 2025. « Nous en sommes à 357 286 salariés », soit « +0,5 % par rapport à il y a deux ans », observe Edouard Durier. Pour relancer le recrutement, la FFB Grand Paris Île-de-France plaide pour que l'alternance soit rendue éligible aux clauses d'insertion des marchés publics.
« L'objectif, évidemment, c'est de fidéliser les jeunes en formation et de sécuriser les volumes de chantier à venir », développe son vice-président en charge des affaires économiques.
Pour accroitre la sérénité des professionnels du bâtiment franciliens, l’antenne locale appelle à un tarif de stationnement unifié et avantageux, au-delà de certaines zones de Paris intra-muros.
Par Virginie Kroun
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