DPE : les diagnostiqueurs trop productifs désormais sous surveillance

À compter du 1er octobre 2025, les diagnostiqueurs immobiliers réalisant plus de 1 000 DPE sur 12 mois glissants seront automatiquement suspendus, sauf à fournir une justification jugée recevable. Ce seuil concerne à la fois les maisons individuelles et les appartements. L’arrêté, publié vendredi 26 juillet au Journal officiel, s’inscrit dans le plan d’action gouvernemental visant à renforcer la fiabilité du DPE, document obligatoire dans toute vente ou mise en location de logement.
Le ministère du Logement justifie cette mesure par la nécessité de s’assurer que chaque diagnostic correspond bien à une visite effective, et de préserver la qualité des évaluations énergétiques, alors que des soupçons d’automatisation, de fraude ou de diagnostics approximatifs entachent la profession.
DPE : un outil sous pression
Le DPE, depuis sa réforme en 2021, est devenu un levier central de la politique de rénovation énergétique et un outil réglementaire influent (interdictions progressives de location, obligations de travaux, aides au financement). Mais il fait aussi l’objet de critiques récurrentes : manque de fiabilité, résultats incohérents, pression concurrentielle entre opérateurs…
Le gouvernement cherche donc à restaurer la confiance dans cet outil. Cette nouvelle disposition vient compléter un ensemble de mesures adoptées en juin dernier, à travers deux décrets également publiés au JO.
Vers un encadrement renforcé des pratiques
Parmi les mesures déjà en vigueur ou à venir : contrôles accrus, examens de certification durcis, QR code obligatoire à présenter lors de chaque visite pour garantir la traçabilité du professionnel, système de détection automatique des comportements suspects via les données centralisées de l’Ademe, et inscription sur une liste noire pendant 18 à 24 mois pour les diagnostiqueurs sanctionnés.
Le ministère insiste sur la nécessité de « garantir la qualité des diagnostics » et précise que les professionnels concernés par une suspension disposeront d’un droit au contradictoire, leur permettant de justifier leur activité. Ces nouvelles règles visent également à lutter contre l’industrialisation de certains cabinets de diagnostics, qui multiplient les interventions au détriment de la rigueur attendue.
Un enjeu central pour la filière bâtiment
Ce durcissement réglementaire ne sera pas sans conséquence pour les entreprises du bâtiment, les artisans rénovateurs et les propriétaires. Le DPE étant un document central pour activer les aides à la rénovation (MaPrimeRénov’, CEE...), la fiabilité des diagnostics conditionne de nombreux projets. Pour les professionnels de la rénovation énergétique, un diagnostic biaisé ou survolé peut compromettre une estimation de travaux, un montage financier ou une planification.
En toile de fond, le gouvernement cherche à éviter les effets d’aubaine, à renforcer la lisibilité du parcours de rénovation, et à limiter les pratiques opportunistes dans une filière qui reste sous tension, tant sur le plan réglementaire qu’économique.
Par Jérémy Leduc