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L’acoustique dans la rénovation, un flou juridique discuté par CINOV

Publié le 11 juin 2021

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CINOV, fédération des syndicats professionnels des ingénieurs-conseils et des bureaux d’études indépendants, organisait ce vendredi un atelier sur les risques juridiques liés à la rénovation acoustique. Un sujet qui fait largement débat pour les nombreux professionnels et experts concernés.
L’acoustique dans la rénovation, un flou juridique discuté par CINOV - Batiweb

« Actuellement, notre cheval de bataille est l’acoustique dans la rénovation, notamment thermique, car c’est un sujet au cœur du plan de relance comme du projet de loi Climat et Résilience », annonce en introduction Jean-Paul Van Cuyck, président de CINOV-GIAc. « D’autant que l’acoustique est souvent un aspect négligé des opérations d’habilitation », ajoute Cédric Coustaury, dirigeant d’Orphea Acoustique et organisateur de la table ronde.


Table ronde à laquelle ont été conviés maître Christophe Sanson, avocat au Barreau des Hauts-de-Seine, et Thierry Mignot, acousticien, architecte DPLG et expert agréé par la Cour de Cassation. Grâce à leur expertise dans le domaine, les deux professionnels ont évoqué les potentiels risques juridiques encourus par les professionnels de la rénovation acoustique. Un rappel qui a donné lieu à un débat sur l’organisation des métiers concernés, notamment du côté des maîtres d’œuvre et maîtres d’ouvrage. 


Une cadre législatif nécessitant une souplesse d’interprétation

 

Thierry Mignot est très clair : « les règles de construction qu’on pratique tous les jours ne s’appliquent qu’aux constructions neuves »L’expert en juridique a tout même évoqué des tentatives de législation de la rénovation acoustique auxquelles il a pris part. La première, datée du 10 janvier 1980 et relevant de la direction de la Construction, distinguait les exigences en matière de performance en fonction de l’étendu des travaux. L’autre projet du 10 juin 1992 dépendait de la direction générale de la Santé et se penchait sur les exigences de seuil décibel, qui correspondaient à celles du neuf. Ces seuils servent souvent de référentiel aux professionnels, ce qu’approuve Thierry Mignot mais avec une « vive précaution ».

Des systèmes de classification ont été également mis en place pour contrôler la qualité de l’acoustique en cas de réhabilitation, dont la norme ISO/TS 19488 d’avril 2021, accompagnée entre autres des certifications Cerqual et Certivéa. Les seuils acoustiques sont en outre encadrés par des textes spécifiques à certains dispositifs, dont le chauffage (arrêté du 23 juin 1978) et les façades (décret du 14 juin 2016 et arrêté du 13 avril 2017). 

Les troubles de voisinage, problèmes récurrents de l’acoustique, ont été légiférées par des articles dédiés du Code denla Santé publique pour les particuliers (art. R 1336-5), comme pour les professionnels (art. R 1336-5). A cela s’ajoutent de grandes notions comme le principe d’antériorité, permettant à la plainte d’un désordre d’être rejetée ou bien l’impropriété à destination, désignant un dommage qui engagerait la responsabilité du constructeur. 

Or, si ces termes juridiques peuvent apporter des éclaircissements, leur utilisation est à l’appréciation des tribunaux réglant les contentieux. Me Sanson cite un procès datant de janvier 2021, concernant une affaire de transformation de chambre de bonnes en appartements en 2009. Les voisins du dessous, installés en 2011, se plaignaient des nuisances sonores provoqués par les décloisonnements. Toutefois, « le juge a rejeté le principe d’antériorité en faveur de la défense, car il importait peu que le désordre était généré avant l’arrivée des plaignants, d’autant que le propriétaire avait conduit les-dits travaux »développe l’avocat.

Un exemple qui reflète bien les complexités de l’application juridique des normes de rénovation acoustique, ayant des répercussions sur le quotidien des maîtres d’œuvre et maîtres d’ouvrage.

Un cadre pratique difficile à définir pour les professionnels 

« Contractualiser les exigences et performances des projets de rénovation acoustique sur bâtiment existant semble fondamental, aussi bien dans le cadre d’un marché que celui de la vente », affirme Thierry Mignot, en invoquant le rôle de l’ingénieur-conseil dans l’accompagnement du maître d’ouvrage dans l’élaboration d’un diagnostic, préalable au travail de programmation de rénovation et d’étude de faisabilité technique et budgétaire de ce dernier.

Des prestations auxquelles les maîtres d’œuvre, eux, ont l’impression de suppléer, dépassant souvent le cadre de leurs propres responsabilités, associées à la performance des projets. Cette confusion sèmerait ainsi le trouble dans les échanges entre les deux métiers et aggraverait les désordres de réhabilitation qui en découlent. 

Malheureusement, lister et répartir exhaustivement les responsabilités de chacun semble un véritable écueil pour les divers acteurs de l’acoustique participant au débat, soulevant questions et désaccords. Peut-être ces derniers trouveront-ils des solutions dans un guide que la fédération CINOV a proposé de réaliser en concertation avec l’Ademe et le Cnejac. Ce document collaboratif pourrait ainsi servir de cadre pratique à l’ensemble des acteurs de l’acoustique.  

Virginie Kroun

Photo de une : Adobe Stock

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