Construction côtière : pourquoi l’océan devient un enjeu stratégique pour le BTP

Le secteur du BTP face à la mer : quand l’océan impose une nouvelle donne
Longtemps écarté des radars, l’impact du BTP sur les milieux marins fait irruption dans l’agenda environnemental. La Conférence des Nations Unies sur l’Océan, qui s’est achevée ce 13 juin 2025 à Nice, marque un tournant. Alors que les États accélèrent sur la protection des océans, le secteur de la construction – en particulier sur le littoral – se retrouve directement concerné.
Le BTP, un acteur souvent oublié… mais très exposé
Ports, digues, promenades côtières, stations balnéaires, infrastructures industrielles ou touristiques : le BTP est omniprésent sur les littoraux. Mais cette présence est loin d’être neutre.
- Ruissellements polluants (béton, hydrocarbures, solvants) vers les eaux côtières.
- Perturbation des écosystèmes : destruction de zones humides, artificialisation des plages.
- Érosion accélérée par des aménagements mal intégrés aux dynamiques naturelles.
“Chaque chantier côtier est un système vivant. Il faut réapprendre à construire avec l’océan, pas contre lui”, rappelle un urbaniste présent à Nice.
Une pression réglementaire en hausse
La conférence de Nice a adopté une déclaration politique ambitieuse (Nice Ocean Action Plan), qui pourrait ouvrir la voie à des normes renforcées pour les aménagements littoraux.
- Moratoire sur l’exploitation des fonds marins : un signal fort sur l’approche de précaution, qui pourrait s’étendre à d’autres domaines.
- Traité sur la haute mer : bientôt en vigueur, il obligera à des évaluations environnementales renforcées pour les projets à proximité de zones marines sensibles.
- Cartographie des zones côtières à risque, pilotée par des programmes scientifiques internationaux, pour mieux encadrer les constructions futures.
Des opportunités d’innovation pour les pros du BTP
Face à cette évolution, le secteur a tout intérêt à intégrer la résilience océanique dans ses pratiques :
- Bétons “bio-compatibles” conçus pour favoriser la biodiversité marine (ex. récifs artificiels intégrés).
- Matériaux perméables et solutions de drainage pour limiter la pollution des eaux.
- Techniques douces d’aménagement littoral, basées sur la nature (reconstitution de dunes, zones tampons végétalisées…).
- Recyclage des eaux grises ou captation des eaux de pluie sur les chantiers côtiers.
Une responsabilité à partager… avec des marchés à la clé
Le message de Nice est clair : la construction doit devenir un maillon actif de la régénération marine. C’est aussi une opportunité :
- Pour les industriels : développement de produits “océan-compatibles”.
- Pour les entreprises de travaux : positionnement sur les projets résilients côtiers (digues naturelles, infrastructures flottantes…).
- Pour les collectivités : intégrer les critères “océan” dans leurs appels d’offres.
Par Camille DECAMBU
Photo à la une : BK