Kengo Kuma : l’architecte japonais qui fait disparaître les bâtiments dans la nature

“Je veux que mes bâtiments s’effacent pour révéler ce qui les entoure.”
Une trajectoire au service de la discrétion
Né en 1954 à Yokohama, Kengo Kuma grandit dans l’ombre du béton post-guerre et du modernisme brutal. Diplômé de l’université de Tokyo puis de Columbia (New York), il fonde son agence Kengo Kuma & Associates en 1990 avec une ambition : faire disparaître l’architecture dans son environnement.
À rebours des stars du “starchitecture”, Kuma revendique une architecture modeste, sensible et locale. Il rejette le monumentalisme, préfère les textures, la lumière naturelle et les matériaux vivants.
Une approche : l’anti-architecture monumentale
Kuma ne conçoit pas pour être vu, mais pour être ressenti.
- Et si une façade vibrait comme un rideau dans le vent ?
- Et si une bibliothèque se fondait dans la forêt ?
- Et si un stade devenait une extension du paysage ?
Ses projets s’inspirent du wabi-sabi, esthétique japonaise de l’impermanence, et privilégient le bois, la pierre, la terre, le papier, en interaction avec la lumière et l’eau.
5 projets qui incarnent sa vision
Stade national de Tokyo (2020)
Construit pour les JO de Tokyo.
Structure en bois lamellé-collé, ventilation naturelle, intégration paysagère.
Un manifeste contre les stades impersonnels en béton.
V&A Dundee Museum (2018, Écosse)
Bâtiment en strates de béton inspirées des falaises marines.
Dialogue entre tradition écossaise et design japonais.
GC Prostho Museum Research Center (2009, Japon)
Pavillon expérimental utilisant des assemblages bois traditionnels (kumiki).
Sans clou ni colle. Entre artisanat et haute technologie.
Musée Suntory (Kyoto)
Structure en céramique et bois, toiture végétalisée.
Atmosphère feutrée, entre architecture et jardin.
Musée Albert-Kahn (2022, Boulogne-Billancourt)
Rénovation en douceur d’un musée de la paix et des jardins du monde.
Bois clair, volumes bas, intégration délicate au parc existant.
Un maître de la subtilité devenu star mondiale
Kengo Kuma est aujourd’hui l’un des architectes les plus respectés du monde.
Il enseigne à l’université de Tokyo, donne des conférences dans le monde entier, et dirige une agence internationale, tout en restant fidèle à son éthique minimaliste.
Il est aussi très présent en France, où il a mené plusieurs projets publics et culturels.
Une architecture écologique par nature
Kuma ne parle pas d’“écologie” – il la pratique.
- Préférence pour les circuits courts, les savoir-faire locaux
- Matériaux biosourcés (bambou, bois, terre crue)
- Systèmes passifs de ventilation, gestion de l’eau, lumière naturelle
Il propose un modèle d’architecture low tech, douce et réparatrice, à rebours de la consommation énergétique massive.
3 choses à retenir
- Kengo Kuma pense l’architecture comme un prolongement du paysage, pas comme une sculpture imposée.
- Il redonne vie aux matériaux traditionnels en les hybridant avec des techniques modernes.
- Il propose une voie moderne et modeste vers une architecture sensible, durable et contextuelle.
Par Camille Decambu