Moratoire sur les renouvelables : la ministre dénonce un non-sens énergétique

La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a vivement critiqué le 21 juin le moratoire voté à l’Assemblée nationale sur les nouvelles installations éoliennes et photovoltaïques, dans le cadre de l’examen de la proposition de loi sur la programmation énergétique de la France. Selon elle, cette mesure menace directement l’indépendance énergétique du pays, ainsi que 150 000 emplois liés aux énergies renouvelables.
Un vote à contre-courant des ambitions climatiques
Adopté jeudi dernier à l’Assemblée dans un hémicycle clairsemé, cet amendement – porté par Les Républicains avec le soutien du Rassemblement national – impose un moratoire immédiat sur tout nouveau projet éolien ou photovoltaïque. Il va à l’encontre de la stratégie climatique nationale, qui prévoit de réduire la part des énergies fossiles de 60 % à 42 % d’ici 2030.
« Ce vote nous met dans la main de pays qui sont nos ennemis », a fustigé la ministre sur France 3, rappelant que la France ne produit ni gaz naturel ni pétrole. Elle a insisté sur la nécessité de maintenir un mix énergétique équilibré alliant nucléaire et renouvelables.
Une relance du nucléaire, mais à quel prix ?
Le texte, porté par le sénateur LR Daniel Gremillet, prévoit aussi une relance massive du nucléaire. Mais selon Agnès Pannier-Runacher, cela ne doit pas se faire au détriment du photovoltaïque ou de l’éolien, en particulier de l’éolien en mer, qu’elle juge « aussi compétitif que le nucléaire existant ». Elle admet qu’un certain rééquilibrage peut être envisagé dans les régions déjà fortement équipées, mais rejette catégoriquement une interdiction totale : « Qu'on dise zéro éoliennes, zéro photovoltaïque, ça n'a pas de sens ».
L’avenir du texte reste incertain. Celui-ci doit faire l’objet d’un vote solennel mardi à l’Assemblée avant une deuxième lecture prévue en juillet au Sénat. En attendant, la ministre en appelle à la « responsabilité » des parlementaires pour corriger le tir.
Programmation énergétique : le MoDem et Horizons disent non au texte amendéLe groupe MoDem a annoncé lundi qu’il voterait contre la proposition de loi énergétique. Dans une interview accordée aux Échos, Marc Fesneau dénonce un texte devenu « totalement désarticulé » au fil des débats. Il pointe notamment l’incohérence d’un moratoire sur les renouvelables, alors même que l’objectif est d’atteindre 200 TWh d’énergies vertes. « On veut supprimer le solaire et l’éolien... Comment va-t-on faire ? », s’interroge-t-il. Marc Fesneau estime le coût potentiel des mesures à plus de 20 milliards d’euros par an et alerte sur les conséquences pour le pouvoir d’achat. Il critique aussi l’idée d’une sortie du marché européen de l’énergie, qui selon lui ferait exploser les tarifs. De son côté, le président du groupe Horizons à l’Assemblée, Paul Christophe, propose également à ses collègues de voter contre. Il suggère un retour à la version initiale du texte votée au Sénat, jugée plus cohérente. Même au sein de la droite, des voix dissidentes émergent. Antoine Vermorel-Marques, député LR et spécialiste des questions environnementales, regrette un vote qui « contrevient à la ligne défendue par la droite depuis le Grenelle de l’environnement ». Enfin, le Rassemblement national menace d’une motion de censure si le gouvernement tentait de passer la PPE3 par décret. |
Par Jérémy Leduc
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