Relance du nucléaire : l’Assemblée nationale donne un signal fort à la filière

Le 18 juin, les députés ont adopté un article majeur d’une proposition de loi sur le futur énergétique de la France. Le texte rétablit un volet nucléaire stratégique, supprimé en commission, avec un amendement du rapporteur Antoine Armand (Renaissance), soutenu notamment par le Rassemblement national.
« Nous actons une relance d’une ambition inédite : maintien du parc existant, construction de 14 EPR, décision d’un réacteur de 4e génération », s’est félicité Antoine Armand auprès de l’AFP. Cette relance vise à augmenter la capacité nucléaire actuelle – 63 gigawatts – de 27 GW supplémentaires d’ici 2050.
Dans le détail, 10 GW devront être engagés avant fin 2026 (équivalent à six EPR2), et 13 GW supplémentaires (soit huit réacteurs) avant fin 2030. Une orientation jugée nécessaire par l’exécutif pour répondre aux enjeux de souveraineté énergétique et de décarbonation.
Des positions politiques très contrastées
Le soutien au nucléaire n’est pas unanime dans l’hémicycle. La députée LFI Anne Stambach-Terrenoir s’est insurgée contre « les sommes colossales » prévues pour une « énergie du passé », estimant que ces investissements se font au détriment des renouvelables.
Le ministre de l’Industrie, Marc Ferracci, a quant à lui exprimé des réserves sur le rythme du déploiement, préférant reporter à 2026 la décision sur les huit EPR supplémentaires.
À droite, Jérôme Nury (LR) a défendu la logique de la relance : « L’énergie nucléaire est la plus décarbonée, la plus pilotable, la plus souveraine et la plus tenable économiquement ». Un avis partagé par le député RN Alexandre Loubet, pour qui « le nucléaire est la colonne vertébrale de notre indépendance énergétique ».
Le RN engrange des victoires symboliques
Dans la foulée du vote, le Rassemblement national, très mobilisé dans l’hémicycle, a fait adopter plusieurs amendements symboliques. Parmi eux : la relance de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin), fermée en 2020, ou encore l’augmentation de puissance des réacteurs existants.
Marine Le Pen s’est réjouie de ce succès sur X : « Je l’avais promis, le groupe RN l’a fait voter par l’Assemblée nationale ».
Toutefois, ces victoires sont en grande partie programmatiques, sans effet normatif immédiat. « Ces amendements seront réexaminés durant la navette parlementaire », a rappelé Antoine Armand, précisant que la loi vise surtout à orienter le décret de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), attendu cet été.
Les renouvelables reléguées au second plan ?L’absence du solaire et de l’éolien dans la définition des « énergies décarbonées » a provoqué une levée de boucliers du Syndicat des énergies renouvelables (SER). « Cette affirmation laisse de côté, dans un grand élan de négationnisme technologique, les deux filières renouvelables qui se développent le plus rapidement dans le monde », alerte l’organisation. Jules Nyssen, président du SER, estime que « dessiner l’avenir énergétique de la France sans le solaire ni l’éolien est irresponsable », appelant le gouvernement à amender rapidement le texte pour éviter une « aberration énergétique ». Le secteur des renouvelables représente plus de 166 000 emplois en France. Le SER s’inquiète des conséquences industrielles et sociales d’une telle mise à l’écart, au moment où le pays ambitionne la neutralité carbone d’ici 2050. |
Par Jérémy Leduc
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