Objectifs énergétiques : un texte sans consensus, le nucléaire écarté

Adopté le 4 juin par la commission des Affaires économiques de l’Assemblée nationale, le texte sur la stratégie énergétique française a perdu l’une de ses pierres angulaires : la relance du nucléaire. Issue du Sénat, la proposition de loi « Gremillet » prévoyait initialement la construction d’au moins 14 EPR d’ici 2050. Mais, faute de compromis politique, cet objectif a été évincé, au grand dam de plusieurs formations favorables à l’atome.
Le rejet de l’article sur le nucléaire a surpris, notamment avec le vote contre du Rassemblement national (RN), pourtant fervent défenseur d’une relance massive de la filière. Son représentant Maxime Amblard a exprimé ses regrets face à un bloc central qu’il juge trop aligné avec la gauche.
Une feuille de route contestée de toutes parts
Malgré son adoption, le texte est loin de faire l’unanimité. Des députés de tous bords ont dénoncé un document dénaturé par rapport à la version sénatoriale, et ont annoncé leur intention de le remanier profondément à l’Assemblée.
Le rapporteur Antoine Armand, député Renaissance et ancien ministre, est pointé du doigt pour son manque d’ouverture au compromis, notamment par le groupe socialiste, favorable à une relance raisonnable du nucléaire via la prolongation des centrales existantes et la construction de 8 EPR d’ici 2050.
De nouveaux objectifs pour les énergies renouvelables
Si la relance nucléaire a été évacuée, certains amendements ont tout de même été intégrés. Le texte prévoit désormais d’atteindre 18 GW d’éolien en mer d’ici 2035 et 250 MW d’hydrolien à la même échéance, avec une cible de 5 GW en 2050 pour cette dernière.
Un amendement du rapporteur fixe également un objectif de 58 % d’énergie décarbonée dans la consommation totale à l’horizon 2030. En revanche, aucun seuil chiffré n’est prévu pour les énergies renouvelables dans la production d’électricité, un point vivement critiqué par les écologistes et les socialistes.
Une réforme énergétique politisée et fragilisée
Ce texte, censé inspirer le futur décret gouvernemental sur la planification énergétique, illustre les fractures politiques sur la stratégie à adopter.
Réclamé à grands renforts de pression par l’opposition – notamment le RN –, il a été inscrit à l’agenda parlementaire par le Premier ministre pour désamorcer les tensions. Mais son contenu bancal, qualifié de « sans queue ni tête » par le député Joël Bruneau, pourrait encore être profondément remanié. Au moins 40 heures de débat sont déjà prévues à partir du 16 juin à l’Assemblée nationale.
Par Jérémy Leduc
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