Rénovation énergétique : l’IFCT refaçonne ses formations AMO

Pouvez-vous nous rappeler quelle offre de formation propose l’Institut de formation de courtier en travaux (ICFT) ?
Olivier Manaud :Nous formons en ligne, en e-learning. Ce n'est pas de la web conférence, c'est-à-dire que chacun peut commencer quand il veut, du mois de janvier au mois d'août. Les gens s'inscrivent à peu près dans les 15 jours / trois semaines qui précédent.
La spécificité, c'est qu'il y a quand même un accompagnement téléphonique personnalisé de chaque stagiaire. On propose un calendrier de prise de contact avec l'un des formateurs, qui permet de caler un rendez-vous.
Vos apprenants viennent-ils forcément du secteur du bâtiment ?
Olivier Manaud : Ils sont à peu près 50 % à venir du monde du bâtiment et de la construction, voire de l'immobilier. Les 50 % restants ne sont pas du tout de cet univers-là, mais l'ont approché, car ils se sont lancés dans leur propre projet de rénovation, et ont senti une fibre dans ce domaine-là.
C'est un métier qui est plus féminin que le monde de la maîtrise d'œuvre. Des femmes qui ont suivi la formation et c’est vrai que le regard féminin sur l'accompagnement d'un chantier n'est pas toujours le même.
Dans la phase de programmation, par exemple, les femmes ont davantage une qualité d'écoute et d’adaptation au projet, alors qu'un homme pourrait plus facilement avoir des solutions à donner.
L'IFCT n'est relié à aucune franchise. C’est un organisme de formation professionnelle indépendant qui s'est spécialisé dans ce domaine-là et accueille effectivement des gens en reconversion professionnelle. Nos apprenants sont à 99 % de la tranche d’âge 35-55 ans.
Le peu de jeunes qui ont candidaté - c’est-à-dire d’une vingtaine d'années et qui terminaient tout juste leurs études -, je les ai souvent un peu dissuadés. Je les conseillais plutôt d’exercer au moins 3-4 ans dans leur domaine, histoire qu’ils forgent une solidité de posture professionnelle et humaine.
Parce que c'est quand même un métier où l'on est au carrefour des artisans et on peut avoir des clients un peu exigeants. Je pense qu'il faut avoir une maturité humaine suffisante pour pouvoir devenir un interlocuteur, un chef d'orchestre.
Au-delà du savoir-être, quels savoir-faire enseigne l’IFCT ?
Olivier Manaud : Le courtier en travaux couvre trois grands volets de prestations.
D’abord un volet d'accompagnement et de définition du projet, qu'on appelle une phase de programmation. Il concerne souvent un projet de rénovation ou d'extension sur la définition de son projet. Cela va inclure des autorisations d'urbanisme, une étude de faisabilité, mais aussi sur l'estimation des coûts de travaux. Le courtier en travaux va s'engager sur une enveloppe financière, pas un prix fixe, plutôt une fourchette.
Cela va aller jusqu'à un petit dossier programme qui va servir ensuite de support pour les devis, la deuxième phase. C’est le vrai courtage au sens strict, c'est-à-dire démarcher les entreprises. Il y a un travail de négociation de devis annoncé au client, de mise en concurrence, et de demander des précisions si le devis n'est pas assez précis.
En troisième, il y a la phase d'accompagnement de la mise en œuvre. Attention, ce n’est pas de la maîtrise d'œuvre. C’est une subtilité de posture professionnelle. Elle est enseignée et expliquée tout au long parce que ce sont deux métiers différents.
De quelles différences parle-t-on entre assistant à la maîtrise d’ouvrage (AMO) et maître d’oeuvre ?
Olivier Manaud : La formation d'un maître d'œuvre ou la formation d'un assistant maître d’ouvrage renvoie aux mêmes compétences. Mais l’AMO sera à 100 % du côté du client, un peu comme son avocat, alors que le maître d'oeuvre va être à 100 % du côté des artisans, et lui-même va avoir une décennale.
L’AMO ne va avoir qu'une responsabilité civile professionnelle. Mais ce n’est pas à lui de dire à l'artisan ce qui est non conforme à la réglementation. Là où il peut faire arrêter un chantier ou faire modifier, c'est s'il y a une non-conformité contractuelle. Par exemple, quand le plaquiste a fait un devis avec un isolant de 120 mm d'épaisseur et applique une laine de 100 mm.
L’AMO se spécialise-t-il davantage dans la rénovation énergétique ou dans la construction ?
Olivier Manaud : D'une manière générale, le courtier en travaux AMO ne fait à 90 % que de la rénovation ou de l'extension. C'est très rare qu'il fasse du neuf.
Dans la formation, on a créé depuis l'année dernière des modules complémentaires, dont un qui touche à la rénovation énergétique. Sachant que, par exemple, le financement des aides de l'État comme MaPrimeRénov' prennent en charge une partie des honoraires de l'AMO, si ce dernier a déjà une certaine expérience et pouvant être inscrit sur une liste départementale des AMO.
En même temps, au niveau législatif, on a mis la charrue avant les bœufs. La loi a dit qu'il fallait un AMO, mais on ne s'est pas d'abord assurés qu'il y avait suffisamment de personnes sur le terrain pour pouvoir le faire.
Et est-ce le cas ?
Olivier Manaud : Non, il n'y a pas suffisamment de personnes actuellement. Aujourd'hui, les personnes potentiellement agréées, ce sont soit les architectes et les économistes de la construction. Mais ils ont actuellement suffisamment de travail et ont du mal à répondre à des sollicitations pour avoir les prestations AMO.
Il faudrait que ceux qui exercent le métier de courtier en travaux AMO puissent, dans les deux années à venir, passer ces modules et se spécialiser, ou avoir complété leur formation sur la question énergétique.
Mais ce qui est compliqué, c’est que la législation liée à la rénovation énergétique et aux primes de l'État associées, n'arrête pas de changer. Ce qui était vrai en septembre dernier n'est plus vrai aujourd'hui. Et ce qui était vrai en septembre dernier ne correspondait pas à ce qu'il y avait en juin de l'année d'avant.
C'est un vrai casse-tête. Pour les gens qui auraient besoin d'être accompagnés, ce n'est pas clair. Pour les AMO qui sont susceptibles d'accompagner ces gens-là, ce n'est pas clair.
D’autant que l’abattement budgétaire de MaPrimeRénov’, voté pour 2025, peut changer la donne…
Olivier Manaud : Jusqu’à présent, je pense que plus de 90 % du chiffre d'affaires d'un AMO ne dépend absolument pas de ces protocoles financiers. C'est quelque chose qui se rajoute et pour lequel ils sont sollicités. C’est une piste pour déployer l'activité. Bien souvent, cela arrive que les AMO, même ceux qui n'ont pas toutes les billes pour ça, accompagnent les gens et les renvoient vers des cabinets spécialisés qui ne font que du montage administratif pour la levée des subventions.
Car c'est une chose d'avoir la mission d'AMO, c'est autre chose de monter tout le dossier administratif [davantage imputé au réseau Mon Accompagnateur Rénov’, NDLR]. Un AMO pourrait le faire, mais cela peut être très chronophage.
À combien s’élèvent les frais de formation au sein de l’IFCT ?
Olivier Manaud :Quand on a lancé la formation, les frais étaient effectivement à 2 400 euros aujourd'hui. Aujourd’hui ils s’élèvent à 3 040 euros. Nous avons bénéficié du label Calliope, donc le financement France Travail est possible.
L'IFCT a enclenché des démarches auprès de France Compétences pour la création d'une reconnaissance certification professionnelle, et donc une éligibilité au CPF.
Pour vous renseigner sur les cursus AMO de l'IFCT, rendez-vous sur son site. |
Propos recueillis par Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock