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Prévenir les chutes de hauteur, un enjeu de taille

Publié le 27 novembre 2023

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Les chutes de hauteur représentent à peu près 40 % des événements dont se charge l’OPPBTP. Même si les choses vont en s’améliorant au fil des années, beaucoup d’entreprises manquent encore de moyens de prévention. Les organismes de prévention et les industriels s'efforcent de poursuivre leurs efforts afin de minimiser au maximum les risques de chutes de hauteur dans le secteur du BTP.
Prévenir les chutes de hauteur, un enjeu de taille - Batiweb

« Les accidents liés à des chutes de hauteur connaissent une baisse à peu près continue depuis les années 1980 », introduit François-Xavier Artarit, expert d’assistance conseil à l’Institut national de recherche et de sécurité pour la prévention des accidents du travail et des maladies professionnelles (INRS). Si sur ce sujet les différents acteurs du BTP semblent emprunter la bonne voie depuis quelques années maintenant, il n’est pas question de lever le pied pour autant.

Le BTP est la première industrie où il y a le plus d’accidents, mais également celle qui concentre plus de la moitié des accidents liés à des chutes de hauteur. En 2021, ces accidents représentaient 17 % des accidents du travail dans le secteur, qui génèrent plus de quatre jours d’arrêt. « C’est quelque chose de logique, puisque dans le bâtiment on fabrique de la hauteur », souligne Manuel Martin, responsable de domaine gros œuvre et structures porteuses à la direction technique de l’OPPBTP. Malgré tout, la sinistralité dans le secteur diminue depuis quelques années. Un constat encourageant qui peut s’expliquer de plusieurs façons.

 

« Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à adhérer aux méthodes de prévention »

 

Pour Christophe Desplat, ingénieur conseil à l’Assurance Maladie, tous les acteurs ont contribué à cette baisse des accidents dans le secteur. « Les organismes de prévention font du bon boulot, et les entreprises sont de plus en plus nombreuses à adhérer aux méthodes de prévention. Les fournisseurs proposent quant à eux des matériels de plus en plus sécurisés, et les salariés ainsi que l’encadrement sont de mieux en mieux formés », énumère M. Desplat.

Des entreprises de plus en plus nombreuses à adhérer aux méthodes de prévention, comme celle de M. Mallez, PDG de la société Pierre Mallez, entreprise de peinture en activité depuis 1892. En raison de leur métier, les salariés de M. Mallez sont particulièrement concernés par les risques de chute de hauteur. L’OPPBTP et la FFB, dont est membre l’entreprise, ont révélé plusieurs données statistiques sur l’exposition des peintres à ce type de risque. « Ces chiffres révèlent que nous sommes particulièrement touchés par les accidents résultant de chutes en hauteur de moins de quatre mètres, voire moins, ce qui met en évidence l’importance cruciale de s’attaquer à ce problème », souligne M. Mallez.

Le dirigeant a donc pris plusieurs mesures pour minimiser les risques au sein de son entreprise. « La première mesure que j’ai prise a consisté à me former, ainsi que mon personnel, en collaboration avec l’OPPBTP. Pour les entrepreneurs, cet organisme est l’outil le plus performant qui soit pour la sécurité. J’ai ensuite entrepris une campagne de sensibilisation et de formation à l’attention de tous nos ouvriers. Chaque nouveau membre intégrant notre équipe bénéficie d’une sensibilisation et d’une formation spécifique au sein même de l’entreprise. Dans le cadre de nos efforts pour éliminer les risques, nous avons décidé de nous débarrasser définitivement des escabeaux, et d’interdire leur acquisition depuis près de 15 ans. À la place, nous avons investi dans des plateformes individuelles hautement performantes, conformes aux normes de sécurité, et capables de s’adapter à n’importe quel espace », détaille M. Mallez.

 

L’OPPBTP part en campagne contre les chutes de hauteur

 

Nul doute que les organismes de prévention ont un rôle majeur, si ce n’est capital, à jouer pour prévenir les risques de chute de hauteur. L’OPPBTP en a même fait l’un de ses grands combats pour le début de l’année 2024. L’organisme va d’ici peu lancer une vaste campagne sur les chutes de hauteur en partenariat avec la sécurité sociale, la direction du travail, la médecine du travail ou encore les fédérations « pour rappeler quelques grands principes : préparation, anticipation, méthodologie, conformité du matériel… Tout ce qui permet de garantir, autant à l’employeur qu’au salarié, une sécurité sur les postes de travail », indique Manuel Martin.

Concrètement, des campagnes d’affiches et des films de promotion vont être déployés. Des groupes de travail et de réflexion avec des entrepreneurs et des entreprises auront également lieu. En plus de la communication sur le site de l’OPPBTP, l’organisme a aussi « développé une application smartphone pour aider les chefs d’entreprises et les représentants d’entreprises à vérifier un échafaudage », détaille M. Martin.

Ce dernier relève également l’implication de l’OPPBTP dans l’évolution des normes. « On ne s’arrête pas simplement à l’aspect communication, on va également s’impliquer dans les démarches normatives, dans les démarches de développement. On travaille avec des industriels afin de trouver des solutions pour les couvreurs, desquels on développe du matériel qui permet au professionnel de prendre appui, pour éviter qu’il se fatigue trop, par exemple », abonde-t-il.

La prévention et la formation sont indispensables pour prévenir les risques de chutes de hauteur. En outre, la France est l’un des pays européens avec les plus fortes réglementations. Ne serait-ce qu'avec les échaufaudages. « Depuis l’arrêté du 21 décembre 2004, vous avez une vérification avant la mise en service et une vérification journalière. Tous les trois mois, il y a un examen d’état de conservation approfondi de l’échafaudage qui doit être fait. Tous les monteurs d’échafaudage doivent également avoir été formés », souligne François-Xavier Artarit, de l’INRS.

 

On n’arrête pas le progrès

 

Les choses vont donc en s’améliorant, incontestablement, même si de nombreux efforts restent encore à fournir. Avec les progrès techniques, les industriels dévoilent des solutions de plus en plus pratiques et sécurisantes. Même si elles peinent encore à séduire quelques entreprises. En cause, un manque de connaissance de ces nouveaux outils, une problématique de prix, ou encore des habitudes de travail dont certains compagnons ne veulent pas se débarrasser. « Les gens ne remettent pas forcément en cause leurs habitudes de travail. Il y a des façons de faire qui perdurent », explique M. Artarit.

Heureusement, il existe « des subventions qui accompagnent les professionnels dans l’acquisition de matériel ultra sécurisé », comme le rappelle Richard Perrin, responsable marketing chez Tubesca-Comabi, expert des solutions d’accès de travail en hauteur. Ces solutions cherchent à simplifier la vie des compagnons, et à minimiser encore davantage les risques de chutes de hauteur.

Des matériels qui peuvent être de tout type, et pour tous les usages. Concernant les plateformes de travail ou les échafaudages par exemple, Tubesca-Comabi a « identifié le besoin des utilisateurs de produits malins », comme l’explique Richard Perrin. L’entreprise a développé pour cela des échafaudages roulants télescopiques. « Ce sont des produits monoblocs et extrêmement compacts, donc il est possible de les mettre dans le coffre de petits utilitaires. On a un produit de référence, le Z’tower, qui est ultra compact et qui se monte et se démonte en deux minutes. Cela permet des gains de productivité vraiment énormes pour les utilisateurs », déclare M. Perrin.

Les causes d’une chute de hauteur sont multiples. Elles peuvent venir « des conditions environnementales, du climat, du vent, de l’humidité ou même de la fatigue », comme l’explique Manuel Martin. Les éléments naturels peuvent abîmer les toitures, et les couvreurs sont donc parfois contraints d’effectuer leur métier à la hâte. « Tous les ans, il y a entre 4 et 5 chefs d’entreprise artisanale qui décèdent quand ils vont faire des devis sur les toits», regrette M. Martin.

Pour éviter cela, des industriels commencent à développer l’usage de drones lors de la réalisation des devis. Ainsi, le chef d’entreprise reste au sol, et son drone se charge d’effectuer les mesures de la toiture grâce à une IA. « On espère qu’à très court terme, le drone sera capable de voir les défaillances ou les défauts du toit. Ainsi, le chef d’entreprise n’aura plus à monter dessus », explique le responsable de l’OPPBTP.

L’organisme travaille également avec les fabricants de matériaux pour augmenter la capacité de leur produit à résister au poids de l’homme. « On a beaucoup d’accidents d’ouvriers qui passent à travers des toitures, donc aujourd’hui on sollicite les industriels pour qu’ils développent des matériaux un peu plus résistants », explique Manuel Martin.

« Afin de trouver la solution adaptée pour prévenir les risques de chutes de hauteur, il faut en amont bien identifier son besoin, bien identifier les contraintes liées à l’environnement de travail pour définir si on doit utiliser un moyen d’accès ou un poste de travail. Il y a la notion de besoin qui conditionne le produit, une fois que l’on a compris si on a besoin d’une plateforme, d’un marchepied, etc. », conclut Richard Perrin.

 

> Consulter le dossier spécial Prévention dans le BTP

 

Propos recueillis par Jérémy Leduc

Photo de une : Adobe Stock

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