Maison individuelle : quels gestes de rénovation sont les plus efficaces ?
Beaucoup s’interrogent sur les meilleures techniques afin de limiter les déperditions de chaleur dans un bâtiment. Mais plus concrètement, quels sont les gestes les plus efficaces pour améliorer la performance énergétique d’un bâtiment ? En particulier quand il s’agit d’un logement ?
C’est l’objet d’une étude menée conjointement par la Fédération française du bâtiment (FFB) et le bureau d’études Pouget Consultants, présentée à l’occasion du salon Renodays.
L’étude est le fruit de 500 simulations sur 8 maisons individuelles et 7 appartements. « On a fait nos simulations sur deux zones climatiques pour une diversité des résultats. Donc avec les zones H1 - typiquement ce qu'on va avoir en région parisienne et dans le Grand Est - et zone H3 - c’est-à-dire le pourtour méditerranéen. On a testé différents scénarios qui permettent de sortir de l'état de passoire énergétique, donc via des gestes liés à l'isolation : l'isolation de l'enveloppe, l'isolation des murs, isolation de la toiture par exemple. Et un autre scénario plutôt axé sur les systèmes de chauffage », détaille Thibault Gimond, ingénieur énergie et environnement Bâtiment à la FFB.
« On a essayé de poser des points de travaux qui sont adaptés aux différentes typologies », ajoute de son côté Julien Parc, responsable des Études Prospectives de Pouget Consultants. À savoir que les simulations sont réalisées à partir de la méthode de calcul de diagnostic de performance énergétique (DPE) de 2021. « Ce n’est pas forcément la réalité, ça reste du théorique », prévient Thibault Gimond. Surtout quand on sait que la nouvelle méthode de calcul du DPE est de plus en plus remise en question.
Les résultats qui en découlent permettent toutefois de dessiner des tendances de parcours de rénovation, en particulier pour la maison individuelle.
L’isolation des murs, le premier geste pour sortir du statut de passoire énergétique
L’étude se déploie en deux axes. D’abord : voir quelle première étape de travaux permet à un logement de sortir de l’état de passoire énergétique.
« Il y a à peu près 5 millions de résidence qui ont ce niveau de passoire énergétique, avec différentes contraintes, notamment une interdiction progressive de leur mise en location »,rappelle Thibault Gimond. « Récemment, il y a une dizaine de jours, on a justement un décret qui est sorti, et qui crée la notion d’indécence et permet de savoir qu’à partir de 2025, les logements G, et en 2028, les logements F seront considérés comme indécents. Donc : impossible de pouvoir les mettre en location », abonde-t-il.
La FFB et Pouget Consultants se sont concentrés sur les logements F et G, afin d’évaluer l’impact des travaux. « À savoir le traitement des murs, avec l'isolation par l'intérieur ou par l'extérieur en fonction des configurations, le changement de système de chauffage et de chauffe-eau unitaire, l'isolation du plancher haut, donc la toiture ou les combles en fonction des configurations, l'isolation du plancher bas, le changement de menuiserie et le changement de ventilation », énumère Julien Parc.
« Là, on est vraiment sur des gestes qui sont pris indépendamment. On n'est pas sur la combinaison de travaux », souligne le responsable des Études Prospectives de Pouget Consultants.
Première conclusion : « Il y a deux typologies de travaux qui se démarquent fortement en maison individuelle. C'est l'isolation des murs, qui est le geste le plus efficace pour diminuer les consommations énergétiques des bâtiments, avec un gain de 30 % en moyenne » relève-t-il. Vient après le changement de chauffage, « dont l’impact varie entre l’état existant et du système choisi. En moyenne, le gain est de 30 % ».
D’autres types de travaux concentrent des gains énergétiques plus limités : l'isolation du plancher haut (+10 %), l'isolation du plancher bas (+7 %), le changement de menuiseries (+4 %) ainsi que le changement de ventilation (+3 %). « Dans le changement de ventilation, on a à la fois du simple-flux et du double-flux », précise Julien Parc.
En proportions, les projets de rénovation de passoires énergétiques placent aussi l’isolation des murs en premier. « Dans environ 70 % ou 75 % des cas, la simple isolation des murs permet de sortir des logements qui étaient en statut de passoire. C'est également le cas pour environ 60 % des interventions avec un changement de système de chauffage. Et par contre, c'est seulement le cas pour 20 à 25 % pour l'isolation du plancher bas et 10 % dans le cadre de l'isolation du plancher haut », compare le responsable des Études Prospectives au Pouget Consultants.
Les changements de menuiseries ou de ventilation ne permettraient pas à eux-seuls la sortie d’une maison individuelle de son statut de passoire thermique.
Côté remplacement de système de chauffage, il s’agit encore une fois d’une géométrie variable selon le bâti.
Mais comme le résume bien l’expert de Pouget Consultants : « Il y a des systèmes de chauffage qui vont permettre un gain très important en termes d'émissions de gaz à effets de serre : la chaudière biomasse, la PAC Air-Air, la PAC Air-Eau. Il y a des systèmes qui vont vous permettre un gain en termes de consommation énergétique, notamment la PAC Air-Eau, la PAC hybride et la PAC Air-Air ». Mais systématiquement et indépendamment de la faisabilité technique, « il y a deux systèmes qui sortent du lot, c’est la mise en place d’une PAC Air-Eau ou de la PAC hybride », expose l’intéressé.
Pour autant, « ça ne veut pas dire que ces systèmes de chauffage peuvent systématiquement être mis en œuvre sans utiliser d'isolation ».
Entre l’objectif étiquette B ou C, les parcours de travaux diffèrent…
La seconde partie de l’étude de la FFB et de Pouget Consultants consiste à définir un parcours et les meilleures combinaisons de travaux, afin d’atteindre un niveau de rénovation performante, au sens de la loi Climat et Résilience.
Niveau de rénovation performante analysée à travers deux étiquettes énergétiques : la B et la C.
Afin d’arriver à l’étiquette énergétique C, « il y a deux scénarios qui sont possibles. Il y a un scénario, où on va d'abord engager des travaux sur l'enveloppe. Et ensuite potentiellement, on traitera les systèmes de chauffage dans un second temps. Puis il y a une logique qui pourrait être : "Je change aujourd'hui mon système de chauffage, j’y allie des lots d’isolation d’enveloppe/d’isolation. Mais je termine mon parcours sur l'enveloppe, peut-être dans une deuxième étape, avec un dernier lot d’enveloppe" », décrit Julien Parc.
Pour ce qui est du remplacement des systèmes de chauffage, la PAC Air-Eau, la PAC hybride ou la chaudière gaz sont envisageables, à condition de bien isoler la maison.
Quand l’ambition est d’arriver à l’étiquette énergétique B, la logique est différente. « Ce qu'on voit, c'est qu’il faut quasiment systématiquement traiter à la fois l'enveloppe et les systèmes de chauffage. Donc, il n’y a plus trop cette logique de parcours priorité enveloppe/priorité système », oppose le responsable des Études Prospectives au Pouget Consultants.
Qu’importe toutefois qu’il s’agisse de rénovation par geste ou globale, l’étude souligne bien une chose : l’intérêt de tels travaux pour le parc immobilier français. Surtout après des hausses des prix de l’énergie courant 2022 mais aussi face à une crise du logement neuf galopante.
« Pour autant, depuis quelques années, on considère que ce n'est pas assez soutenu et d'un point de vue, au niveau des aides et les CEE ont fortement chuté. Donc, il y a vraiment une action à mener pour dynamiser davantage le soutien à cette typologie de travaux, notamment isolation des murs », défend Thibault Gimond, de la FFB.
Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock