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Rénovation tertiaire : entre contrainte réglementaire et opportunité économique

Publié le 10 octobre 2025
Mis à jour le 10 octobre 2025 à 16h29

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Entre décret tertiaire et directive européenne, la rénovation énergétique du parc tertiaire s’impose comme une urgence. Pour les experts réunis au salon Renodays, cette contrainte réglementaire est aussi une opportunité économique à saisir avant que la « valeur brune » ne remplace la valeur verte.
©J.M. (avec de gauche à droite : Olivier Perier, Alexandre Aupet, Pascale Courcelle et Julien Tami)
©J.M. (avec de gauche à droite : Olivier Perier, Alexandre Aupet, Pascale Courcelle et Julien Tami)

L’heure n’est plus à la tergiversation pour les acteurs du bâtiment non résidentiel. La rénovation énergétique n’est plus un sujet périphérique, mais une obligation réglementaire et économique.

Entre le décret tertiaire, qui impose jusqu’à 60 % de réduction de la consommation d’ici 2050, et la directive européenne EPBD, qui fixe la neutralité carbone du bâti en 2050, la pression s’accentue.

« Le secteur du bâtiment est extrêmement émissif. Sur le milliard de mètres carrés tertiaires en France, 60 % appartiennent au privé », rappelle Pascale Courcelle, directrice du Financement Immobilier Énergie Environnement chez Bpifrance.

Si la France fait figure d’élève appliqué avec son décret tertiaire, elle doit encore prouver que ses objectifs sont compatibles avec la future directive européenne, selon Julien Tami, de la Commission Européenne : « Une simulation sera nécessaire pour vérifier la pleine conformité des objectifs français avec les exigences européennes ».

Des réglementations complexes mais incontournables

 

Malgré la bonne volonté affichée, la mise en conformité avance lentement. À ce jour, seuls 54 % des bâtiments concernés sont enregistrés sur la plateforme OPERAT. Le principal obstacle reste la complexité du dispositif. « C’est un texte très court, mais il a généré une FAQ de 40 pages ! », ironise Pascale Courcelle.

Beaucoup d’entreprises ignorent encore qu’elles sont concernées. Le terme « tertiaire » recouvre bien plus que les bureaux. Ce dernier englobe également les entrepôts, locaux sociaux ou bâtiments d’enseignement.

Cette méconnaissance pourrait coûter cher, car au-delà des sanctions financières, les bâtiments non conformes risquent la dévalorisation, prévient Mme Courcelle : « Sans rénovation, l’immeuble perd sa valeur. On parle désormais de “valeur brune” face à la “valeur verte" ».

Des solutions techniques et financières à portée de main

 

Pour les entreprises, l’enjeu n’est pas seulement de réduire leur consommation, mais de consommer mieux. « Chez Dalkia, on agit sur deux leviers : consommer moins et consommer mieux », explique Olivier Perrier, directeur commercial pour les marchés tertiaires et collectivités.

Les contrats de performance énergétique (CPE) permettent d’assurer des résultats mesurables et durables, avec un protocole de suivi reconnu (IPMVP). « 100 % des CPE atteignent leurs objectifs », affirme l’intervenant de Dalkia.

Côté industriels, Alexandre Aupet, du groupe Atlantic, rappelle que le chauffage représente près de 50 % de la consommation tertiaire : « Moderniser les générateurs thermodynamiques, c’est agir vite et efficacement, avec des retours sur investissements rapides ».

Bpifrance accompagne cette transition à travers ses diagnostics « Perfimo », ses prêts longs et des outils de financement simplifiés. Les Certificats d’Économie d’Énergie (CEE), le fonds chaleur de l’ADEME ou le tiers financement complètent ce panel d’aides.

Agir vite, pour ne pas subir

 

Malgré un contexte économique tendu, les intervenants s’accordent à dire que la rénovation est davantage une opportunité qu’une contrainte. « Les entreprises ont compris que c’était un moyen d’atteindre leurs objectifs économiques », souligne Olivier Perier.

Car l’inaction coûtera plus cher, puisque la hausse des taxes sur les énergies fossiles (CPB en 2026, TS2 en 2027) alourdira encore la facture.

Les bénéfices, eux, dépassent la simple économie d’énergie : attractivité, confort des salariés, image environnementale, résilience climatique… « L’immeuble devient un centre de services verts, un levier d’attractivité pour les talents comme pour les investisseurs », insiste Pascale Courcelle.

Les exemples concrets sont légion, à commencer par les Terrasses du Port de Marseille, avec notamment l’installation de panneaux photovoltaïques, de la thalassothermie, un pilotage intelligent. Ou encore la ville de Mazamet, qui a réduit de 51 % sa consommation dès la première année grâce à un CPE.

Pour clore la conférence, Olivier Perier déclare : « Il faut agir tant qu’il y a des aides. Mieux vaut avancer avec la carotte aujourd’hui plutôt que d’attendre le bâton demain ». Comme une mise en garde pour les entreprises qui n’auraient pas encore sauté le pas.

 

Par Jérémy Leduc

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