Grand Paris Express : Eiffage condamné pour homicide involontaire

Plus d’un mois après avoir condamné deux responsables de la société Sampieri Construction à des peines de prison avec sursis, le tribunal correctionnel de Bobigny vient de rendre un nouveau verdict, toujours dans le cadre d’accidents liés aux chantiers du Grand Paris Express.
Ce 3 juillet, l'entreprise Eiffage a en effet été condamnée à 200 000 euros d’amende pour avoir involontairement causé la mort d’un chauffeur de camion en 2023.
Rappel des faits et déroulement du procès
Le 7 mars 2023, à 07h16, Franck Michel vient d’effectuer sa livraison sur le chantier de la gare du Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) de la future ligne 16 du Grand Paris Express. Il replace la bâche latérale de son véhicule quand il est percuté à la tête par un colis de plus d’une tonne tombée d’un chariot élévateur.
Eiffage Génie Civil a comparu le mois dernier à Bobigny en tant que personne morale, au côté d’un conducteur des travaux, pour cet accident du travail, l’un des cinq mortels recensés sur le colossal chantier des nouvelles lignes de métro automatique en banlieue parisienne.
Le tribunal a pris la décision de relaxer le conducteur de travaux du chef d’homicide involontaire, au motif qu’il n’a pas commis de faute « caractérisée ou délibérée ». Le responsable n’était pas présent sur les lieux au moment du drame, mais sur le chemin de la gare.
Les juges ont en revanche estimé qu’en commettant une « faute simple », à savoir en ne transmettant pas le protocole de sécurité, il avait engagé « la responsabilité de la personne morale », son employeur Eiffage.
Le parquet avait requis une peine d’amende de 300 000 euros contre Eiffage, en récidive car déjà condamnée pour un autre homicide involontaire, et neuf mois de prison avec sursis et 20 000 euros d’amende contre le conducteur de travaux.
La famille fustige des manquements de la part d’Eiffage
Lors de l’audience, qui s’est déroulée le 5 juin, l’entreprise avait essuyé la colère d’une sœur de la victime : un groupe de BTP qui « brasse des milliards » devrait être « nickel » sur la sécurité, avait asséné Karine Michel.
« Je sais que vous ne vous êtes pas levés le matin en vous disant “on va tuer quelqu’un” (...), mais par vos manquements de sécurité, vous l’avez quand même tué », leur avait-elle lancé.
La défense d’Eiffage avait fustigé le comportement du chef de chantier, absent du procès, comme « l'auteur direct de l’accident » en lui imputant un comportement « disruptif ».
Elle avait insisté sur le fait qu’au lieu de faire décharger le camion à l’aide d’une grue, le chef de chantier s’était mis lui-même au volant d’un chariot élévateur - sans avoir suivi la formation adéquate - dont les fourches avaient été rallongées avec des poutrelles inadaptées, appartenant à un prestataire.
Par Jérémy Leduc
Photo de Une : Adobe Stock