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Émissions de GES : les chaudières gaz dans le viseur du gouvernement

Publié le 23 mai 2023

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Devant le Conseil National de la Transition Écologique, la Première ministre Elisabeth Borne a exposé un plan de réduction des gaz à effet de serre (GES), en ciblant de manière chiffrée des secteurs économiques. La chaudière gaz serait notamment concernée par une interdiction de nouvelles installations. Une annonce qui a fait réagir l'association Coénove.
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Entre la loi d’accélération des énergies renouvelables et le projet de loi industrie verte, le gouvernement Borne enchaîne les textes avec un objectif affiché : la réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES). Le gouvernement a d’ailleurs augmenté ses objectifs de baisse dans la feuille de route européenne, de l’ordre de -50 % d’ici 2030 par rapport à 1990, contre -40 % prévus. Soit un seuil fixé à 270 millions de tonnes de CO2 équivalent par an (MtCO2e/an) - contre 408 millions en 2022 -  et un rythme de réduction deux fois plus rapide qu’aujourd’hui, car la France en est seulement à -25 %.

 

-26 MtCO2e d'émissions espérées grâce à l’élimination de nouvelles installations de chaudières gaz 

 

La question est de savoir comment ? C’est ce à quoi a répondu, lundi 22 mai dernier, la Première ministre Elisabeth Borne devant le Conseil National de la Transition Ecologique, par un plan d’action chiffré, visant de grands secteurs économiques à l'horizon 2030. 

Parmi les premiers secteurs ciblés figurent les transports et la logistique de livraison. Matignon fait ainsi la part belle à l’électrification des voitures, au passage à l’hydrogène des véhicules, ou encore au covoiturage.

Le projet d’Elisabeth Borne mise également sur la disparition des chaudières recourant aux énergies fossiles. Cela a déjà commencé pour les équipements fioul, dont la loi a interdit les nouvelles installations dans le tertiaire comme le résidentiel.

Mais se dessine également un projet similaire pour les chaudières à gaz . Si les modalités d’application de la future interdiction ne sont pas encore définies, « une économie annuelle de 26 MtCO2e est espérée », selon l’AFP. La question des financements se pose également, que ce soit pour inciter à l'achat de véhicules électriques ou au remplacement des chaudières dans les maisons.

Le plan tend à s’affiner d’ici fin juin, au travers de réunions thématiques prévues entre ministres et acteurs concernés (énergie, agriculture etc). Un « conseil de planification écologique » autour d'Emmanuel Macron permettra d’aboutir à la proposition d’une loi énergie-climat, dans laquelle s’insère le plan de réduction des gaz à effet de serre du gouvernement. 

 

« Une fausse bonne idée », selon Coénove

 

Pour l’heure, des acteurs du bâtiment montrent leur désaccord. C’est le cas de Coénove, qui rassemble énergéticiens, industriels et professionnels, convaincus par la place du gaz « de plus en plus renouvelable » dans « la complémentarité des énergies ». L’association se déclare à la fois inquiète et dans l’incompréhension à l’annonce du projet d’élimination des chaudières à gaz. 

« Quelle est la cohérence d’une annonce non concertée, alors même que des engagements contraires ont été pris par des membres du gouvernement, dont certains exprimés par écrit jusqu’à très récemment ? », s’interroge l’organisation, alors que le président de la République a déclaré vouloir faire une pause sur les nouvelles normes européennes, et que des ministres avaient assuré qu’aucune décision d’interdiction des chaudières au gaz ne se ferait sans concertation préalable. 

D’autant qu’1 logement sur 2 en France est équipé d’une chaudière gaz. L’interdiction de nouvelles installations accentuerait des inégalités sociales et territoriales, mais également le pouvoir d’achat des Français. Déjà car « la pompe à chaleur coûte environ 10 000 € de plus qu'une chaudière gaz performante, avec une durée de vie moindre et des coûts de maintenance supérieurs », soutient Coénove. De plus, l’interdiction réduirait l’offre d’équipements de chauffage et sur lesquels les ménages pourraient  « se ruer de façon anarchique, sans amélioration du bâti ». 

« Les ménages aux revenus modestes, qui sont souvent ceux occupant les logements les moins bien isolés, seraient donc dans l’incapacité d’installer des pompes à chaleur adaptées à leurs besoins et pourraient être incités à prolonger au maximum la durée de vie de leur chaudière, voire à basculer sur du chauffage à effet Joule, peu performant, contribuant à les précariser davantage », poursuit l’association. 

À cela s’ajoutent des contraintes techniques dans le remplacement des chaudières gaz par des PAC électriques (difficultés d'installation, nuisances sonores des unités extérieures, diamètres des canalisations de distribution de l’eau de chauffage, dimensionnement du réseau électrique…). En outre, Coénove évoque de potentielles tensions sur le système électrique français en l’absence du nouveau nucléaire, mais surtout une perte de souveraineté industrielle. 

« Alors que les chaudières sont majoritairement produites en France et en Europe, une grande majorité des composants des PAC électriques provient d’Asie. Des sites industriels français vont devoir s’adapter entraînant une menace sur des emplois locaux et des savoir-faire développés depuis des décennies. Du côté des installateurs/mainteneurs, la conversion rapide de techniciens vers la PAC électrique est complexe et va entraîner un déficit immédiat de ressources qualifiées, alors même que la profession est d'ores et déjà confrontée à des difficultés de recrutement », développe notamment l’association.

Une analyse à nuancer toutefois, car la France serait en avance sur la question de la PAC selon Delta-EE, tandis qu’une internalisation de la production de composants électroniques est en développement parmi des industriels tels qu’Atlantic.

 

« Ce n’est pas l’appareil qu’il faut bannir, mais le gaz qu’il faut verdir »

 

Il n’empêche qu’aux yeux de Coénove, la France doit davantage mobiliser son potentiel de production de gaz renouvelable, estimé à 320 TWh d'ici 2050.

« Les gisements de production de gaz renouvelables pourront donc garantir des quantités de gaz verts supérieures à la consommation totale de gaz prévue en 2050 et permettront d’assurer l’indépendance énergétique de notre pays, tout en décarbonant l'ensemble des secteurs, dont celui du bâtiment », plaide l’association.

Et son président, Jean-Charles Colas Roy, d’ajouter : « Ne mettons pas les Français dans des impasses technico-économiques ! L’atteinte des objectifs de décarbonation fixés par l’Europe « Fit for 55 » est possible tout en permettant à la France de préserver la résilience énergétique du pays, le pouvoir d’achat et les finances publiques. Cela passe par la sobriété choisie et pérenne, l’accélération de la rénovation performante et globale des bâtiments et un soutien au développement des gaz renouvelables pour atteindre 20% de biogaz à 2030. Ne nous trompons pas de combat, ce n’est pas l’appareil qu’il faut bannir, mais le gaz qu’il faut verdir ».
 

Virginie Kroun
Photo de Une : Twitter @Elisabeth_Borne

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