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Remontée de défaillances dans la construction au T2 2022

Publié le 12 juillet 2022

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Selon les chiffres du second trimestre 2022 publiés par Altares, l’ensemble des entreprises renoueraient avec le niveau de défaillances avant la pandémie. Celles-ci repartent donc à la hausse, plus précisément de 49 %. Cette progression des défauts est cependant moins rapide dans la construction (+24 %).
Remontée de défaillances dans la construction au T2 2022 - Batiweb

« Les chiffres de fin 2021 et du premier trimestre 2022 démontraient un retour à la réalité sur le front des défaillances. Depuis février, la tendance à la hausse s’accélère nettement avec une augmentation mensuelle moyenne de 45 %. Nous approchons désormais des niveaux observés en 2019, période de référence d’avant-crise », constate Thierry Millon, directeur des études d’Altares, spécialiste de la data d’entreprise, dans les chiffres du second trimestre 2022.

Ainsi, 9 826 procédures collectives ont été ouvertes du 1er avril au 30 juin, soit une augmentation de 49 % des défaillances au deuxième trimestre 2021. Sur 12 mois glissés, la hausse générale serait de 15 %, pour un total de 34 200 jugements. Les niveaux sont au plus haut depuis octobre 2020. 

« S’ils restent inférieurs à ceux de 2019, année de référence pré-Covid, l’écart se resserre », commente l’étude Altares. Le groupe estime à environ 800 le nombre d’entreprises tombant en défaut chaque semaine et prévoit 37 000 défauts sur l’année 2022. Dans le détail, 289 dossiers pour procédure de sauvegarde ont été enregistrés ce trimestre. Soit une hausse de 75 %, la plus haute depuis 2018 d’après Altares, bien qu’il s’agisse seulement de 3 % des procédures. 

Contrairement aux redressements judiciaires (RJ), qui rassemblent un quart, avec 2 325 jugements prononcés pour une progression fulgurante (+55 %). Ce sont les liquidations judiciaires qui représentent la majorité des défaillances d’entreprises (73 %) en ce T2 2022. Des niveaux supérieurs à ceux traditionnels (68 %), visant 7212 entreprises.

Chiffres Altares sur les défaillances d'entreprise au T2 2022

Dans la construction, la hausse de défaillances moins rapide que la moyenne

 

Comme au premier trimestre 2022, ce sont les activités B2C qui sont les plus fragilisées par les défaillances d’entreprise, que ce soit dans le service à la personne (+111 %), la restauration (+110 %) ou le commerce (+73 %). 

Dans les secteurs B2B, la tendance est moins forte. On le voit particulièrement dans la construction, où la hausse des défaillances est inférieure à la moyenne nationale (2275 contre 1838 ; +24 %). « Elle enregistre toujours un millier de défauts de moins qu’en 2019 à la même période », précise Altares. 

Le secteur le plus à la traîne ce trimestre sont les travaux publics (137 contre 82 ; +67 %), tirés par le bas par les chantiers de terrassement. D’autant que ce secteur du BTP s’expose à une baisse de le commande publique. Vient après le second-œuvre, (1 141 contre 774 ; +47,4%), impacté par les travaux d’isolation, de menuiserie bois et PVC et d’installations thermiques. 

Le gros-œuvre, de son côté, résiste plutôt bien (645 contre 572 ; +13 %), porté essentiellement par la maison individuelle (+9 %). Un fait surprenant, quand on sait que la récente liquidation judiciaire de Geoxia - Maisons Phénix aurait pu probablement emporter le secteur dans son passage. 

Côté immobilier, les agences immobilières sont dans le vert (-1 %) ne rattrape pas  la hausse des défaillances dans la promotion immobilière augmentant de 24 %. Un taux au-dessus du niveau du 2e trimestre 2019.

L’étude a souligné la grande fragilité des 2,6 millions d’entreprises « Covid », qui ont vu le jour en trois ans selon l’Insee – dont 700 000 sociétés commerciales. « Elles représentent 85 % des défaillances et même 93 % des défaillances d’entreprises de moins de 3 ans. Certes, on crée plus d’entreprises mais on en perd plus », note l’étude. Le niveau de défaillance aurait même explosé de 136 %, avec 1 750 procédures ouvertes.

Autre chiffre qui pourrait causer du souci au secteur de BTP : 93 % des entreprises en cessation de paiement sont des TPE, une part relativement constante. Cette taille d’entreprise enregistre 9 095 procédures enregistrées (+47 % sur un an). La hausse est plus forte chez les PME (+74 %), avec 731 cessations contre 420 un an plus tôt. « Une tendance d’autant plus marquée dans les PME des services informatiques (+ 100 %) et du transport routier de marchandises (+ 200 %) », rassure toutefois Altares. 

Le relâchement des aides aux entreprises en cause ?

 

Malgré cette remontée progressive des défaillances : « le climat des affaires ne s’effondre pas, en dépit d’un alignement de facteurs géopolitiques et macroéconomiques qui inciteraient à l’attentisme. L’inflation, la flambée des prix de l’énergie, les ruptures de chaînes d’approvisionnement, la fermeture de certains marchés ralentissent la croissance mais l’économie tient et les entreprises résistent. Sur ces 12 derniers mois, plus de 34 000 sociétés sont tombées mais nous sommes encore loin des pics de la crise financière de 2008 qui dépassaient les 64 000, ni même les 52 000 procédures enregistrées en 2019 », nuance Thierry Millon.

Il n’empêche qu’Altares s’attend à entre 35 000 et 40 000 défauts à la fin de l’année chez les entreprises, attendant toujours la reprise de consommation des ménages. Et ce alors que l’épargne des Français continue d’augmenter et atteint les 319 milliards d’euros au 1er trimestre 2022, dont 151 milliards sont dus au surplus Covid, selon la Banque de France. 

« Le Gouverneur de la Banque de France écarte pour le moment l’hypothèse d’une récession pour ces prochaines années. L’incertitude commande donc à la prudence. La vigilance et le pilotage au plus près de ses portefeuilles d’entreprises clientes et fournisseurs est de mise. Mais in fine, la résilience pourrait bien se confirmer cette année encore comme le maître mot de nos entreprises », ajoute toutefois le directeur d’études d’Altares. 

D’autant que si le relâchement des aides étatiques aux entreprises en pleine pandémie provoquait la crainte, ces soutiens se maintiennent face au conflit russo-ukrainien et l’inflation des prix de l’énergie et des matières premières. Une dynamique déjà relevée sur le trimestre dernier par Altares, évoquant notamment le prolongement de la procédure de traitement de sortie de crise (PTSC) jusqu’au 31 décembre 2022. Au T2 2022, 17 entreprises ont profité de ce réajustement, sur un total de 53 entreprises. 

Sans compter l’étalement du délai de remboursement du PGE, confirmé par le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, en juin dernier et le plan de résilience économique et sociale, annoncé en mars face aux tensions géopolitiques et validé par la Commission européenne le 30 juin dernier. 

Celui-ci permet aux entreprises pour qui les achats de gaz et d'électricité représentent au moins 3 % de leur chiffre d'affaires en 2021, de bénéficier d’un guichet d’aide dédié. Cela s’applique pour les entreprises ayant subi un doublement du prix du gaz par période éligible, de mars à mai 2022 d'une part, de juin à août 2022 d'autre part, par rapport au prix moyen sur l'année 2021. 

Donc pour l’heure : « Altares observe que les retards de paiement sont encore globalement maitrisés ». 


Virginie Kroun 
Photo de Une : Adobe Stock 
 

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